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V ICT OR H UGO
LES MISÉRABLES
T ome 3
Marius
BI BEBO O KV ICT OR H UGO
LES MISÉRABLES
T ome 3
Marius
Un te xte du domaine public.
Une é dition libr e .
ISBN—978-2-8247-1077-8
BI BEBO OK
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Le te xte suivant est une œuv r e du domaine public é dité
sous la licence Cr e ativ es Commons BY -SA
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compris à Bib eb o ok.T OME 3
MARI US
1liv r e I
P ARIS ÉT U DI É D ANS
SON A T OME
2CHAP I T RE I
P ARV U LUS
enfant et la forêt a un oise au ; l’ oise au s’app elle le
moine au ; l’ s’app elle le g amin.P A ccouplez ces deux idé es qui contiennent, l’une toute la
fournaise , l’autr e toute l’aur or e , cho quez ces étincelles, Paris, l’ enfance ; il en
jaillit un p etit êtr e . Homuncio , dirait P laute .
Ce p etit êtr e est jo y eux. Il ne mang e p as tous les jour s et il va au
sp e ctacle , si b on lui semble , tous les soir s. Il n’a p as de chemise sur le
cor ps, p as de soulier s aux pie ds, p as de toit sur la tête ; il est comme les
mouches du ciel qui n’ ont rien de tout cela. Il a de sept à tr eize ans, vit
p ar bandes, bat le p avé , log e en plein air , p orte un vieux p antalon de son
pèr e qui lui descend plus bas que les talons, un vieux chap e au de quelque
autr e pèr e qui lui descend plus bas que les or eilles, une seule br etelle en
lisièr e jaune , court, guee , quête , p erd le temps, culoe des pip es, jur e
comme un damné , hante le cabar et, connaît des v oleur s, tutoie des filles,
p arle ar g ot, chante des chansons obscènes, et n’a rien de mauvais dans le
3Les Misérables Chapitr e I
cœur . C’ est qu’il a dans l’âme une p erle , l’inno cence , et les p erles ne se
dissolv ent p as dans la b oue . T ant que l’homme est enfant, Dieu v eut qu’il
soit inno cent.
Si l’ on demandait à l’énor me ville : ’ est-ce que c’ est que cela ? elle
rép ondrait : C’ est mon p etit.
n
4CHAP I T RE I I
QU ELQU ES-U NS DE SES
SIGN ES P ART ICU LI ERS
Paris, c’ est le nain de la g é ante .
N’ e x ag ér ons p oint, ce chér ubin du r uisse au a quelquefois uneL chemise , mais alor s il n’ en a qu’une ; il a des
soulier s, mais alor s ils n’ ont p oint de semelles ; il a quelquefois un logis, et il
l’aime , car il y tr ouv e sa mèr e ; mais il préèr e la r ue , p ar ce qu’il y tr ouv e
la lib erté . Il a ses jeux à lui, ses malices à lui dont la haine des b our g e ois
fait le fond ; ses métaphor es à lui ; êtr e mort, cela s’app elle manger des
pissenlits par la racine ; ses métier s à lui, amener des fiacr es, baisser les
mar chepie ds des v oitur es, établir des p é ag es d’un côté de la r ue à l’autr e
dans les gr osses pluies, ce qu’il app elle fair e des ponts des arts , crier les
discour s pr ononcés p ar l’autorité en fav eur du p euple français, graer
l’ entr e-deux des p avés ; il a sa monnaie à lui, qui se comp ose de tous
les p etits mor ce aux de cuiv r e façonné qu’ on p eut tr ouv er sur la v oie
pu5Les Misérables Chapitr e I I
blique . Cee curieuse monnaie , qui pr end le nom de loques , a un cour s
invariable et fort bien réglé dans cee p etite b ohème d’ enfants.
Enfin il a sa faune à lui, qu’il obser v e studieusement dans des coins ;
la bête à b on Dieu, le pucer on tête-de-mort, le faucheux, « le diable »,
inse cte noir qui menace en tordant sa queue ar mé e de deux cor nes. Il a
son monstr e fabuleux qui a des é cailles sous le v entr e et qui n’ est p as
un lézard, qui a des pustules sur le dos et qui n’ est p as un crap aud, qui
habite les tr ous des vieux four s à chaux et des puisards dessé chés, noir ,
v elu, visqueux, ramp ant, tantôt lent, tantôt rapide , qui ne crie p as, mais
qui r eg arde , et qui est si ter rible que p er sonne ne l’a jamais v u ; il nomme
ce monstr e « le sourd ». Cher cher des sourds dans les pier r es, c’ est un
plaisir du g enr e r e doutable . A utr e plaisir , le v er br usquement un p avé , et
v oir des clop ortes. Chaque région de Paris est célèbr e p ar les tr ouvailles
intér essantes qu’ on p eut y fair e . Il y a des p er ce-or eilles dans les chantier s
des Ur sulines, il y a des mille-pie ds au Panthé on, il y a des têtards dans
les fossés du Champ de Mar s.
ant à des mots, cet enfant en a comme T alle y rand. Il n’ est p as moins
cy nique , mais il est plus honnête . Il est doué d’ on ne sait quelle jo vialité
impré v ue ; il ahurit le b outiquier de son fou rir e . Sa g amme va g
aillardement de la haute comé die à la far ce .
Un enter r ement p asse . Par mi ceux qui accomp agnent le mort, il y a un
mé de cin. ― Tiens, s’é crie un g amin, depuis quand les mé de cins r ep
ortentils leur ouv rag e ?
Un autr e est dans une foule . Un homme grav e , or né de lunees et
de br elo ques, se r etour ne indigné : ― V aurien, tu viens de pr endr e « la
taille » à ma femme .
― Moi, monsieur ! fouillez-moi.
n
6CHAP I T RE I I I
I L EST A GRÉABLE
, à quelques sous qu’il tr ouv e toujour s mo y en de se
pr o cur er , l’ homuncio entr e à un théâtr e . En franchissant ce seuilL magique , il se transfigur e ; il était le g amin, il de vient le titi. Les
théâtr es sont des espè ces de vaisse aux r etour nés qui ont la cale en haut.
C’ est dans cee cale que le titi s’ entasse . Le titi est au g amin ce que le
phalène est à la lar v e ; le même êtr e env olé et planant. Il suffit qu’il soit
là , av e c son ray onnement de b onheur , av e c sa puissance d’ enthousiasme
et de joie , av e c son baement de mains qui r essemble à un baement
d’ailes, p our que cee cale étr oite , fétide , obscur e , sordide , malsaine ,
hideuse , ab ominable , se nomme le Paradis.
D onnez à un êtr e l’inutile et ôtez-lui le né cessair e , v ous aur ez le g
amin.
Le g amin n’ est p as sans quelque intuition liérair e . Sa tendance , nous
le disons av e c la quantité de r egr et qui convient, ne serait p oint le g oût
classique . Il est, de sa natur e , p eu académique . Ainsi, p our donner un
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