Arthur DaxheletNouvelles de WallonieLe Charmeur de ratsSouvenirs du terroirA une portée de canardière de la ferme du Reinau, occupée par les Dumolu, aufond d’une combe laide et triste, s’accroupissait – je m’en souviens encore – unemasure trapue et comme écrasée sous son vieux toit de chaume moussu.Il paraissait bien, au dire des anciens du village, que cette demeure avait été unedépendance de la métairie des Dumolu, dans une terre desquels elle étaitenclavée ; mais ceux-ci n’avaient jamais pu prouver juridiquement leurs droits à lamaisonnette et au closeau qui l’entourait.C’était pourtant un voisin singulièrement fâcheux qu’avaient les censiers du Reinau.Jean Cretel – ou « li groumacien », comme on l’appelait – avait bien quatre-vingtsans à l’époque dont je parle. Ce qu’on savait de son passé se résumait commececi. Il avait été tambour dans les armées du grand Napoléon. Il était revenu, unjour, à Marnève ; et, dès lors, tout le temps qu’il avait vécu, il l’avait employé à fairele mal ou à purger les innombrables condamnations que lui avaient encourues sesmultiples méfaits.Maquignon à ses heures, braconnier arpentant la campagne et battant les fourréspar toutes les claires nuits, il faisait surtout profit d’un troisième métier, plus lucratifque les deux premiers, celui de sorcier de village. Il passait pour posséder unremède guérissant les enfants de la fièvre lente et il jetait des sorts. On assuraitaussi qu’il administrait d’aucunes fois de ...
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