La Famille du VourdalakFRAGMENT INÉDIT DES MÉMOIRES D’UN INCONNUAlexeï TolstoïPosthume1839-1840L’année 1815 avait réuni à Vienne tout ce qu’il y avait de plus distingué en faitd’éruditions européennes, d’esprits de société brillants et de hautes capacitésdiplomatiques. Cependant, le Congrès était terminé.Les émigrés royalistes se préparaient à rentrer définitivement dans leurs châteaux,les guerriers russes à revoir leurs foyers abandonnés et quelques Polonaismécontents à porter à Cracovie leur amour de la liberté pour l’y abriter sous la tripleet douteuse indépendance que leur avaient ménagée le prince de Metternich, leprince de Hardenberg et le comte de Nesselrode.Semblable à la fin d’un bal animé, la réunion, naguère si bruyante, s’était réduite àun petit nombre de personnes disposées au plaisir, qui, fascinées par les charmesdes dames autrichiennes, tardaient à plier bagage et différaient leur départ.Cette joyeuse société, dont je faisais partie, se rencontrait deux fois par semainedans le château de Mme la princesse douairière de Schwarzenberg, à quelquesmilles de la ville, au-delà d’un petit bourg nommé Hitzing. Les grandes manières dela maîtresse du lieu, relevées par sa gracieuse amabilité et la finesse de son esprit,rendaient le séjour de sa résidence extrêmement agréable.Nos matinées étaient consacrées à la promenade ; nous dînions tous ensemble,soit au château, soit dans les environs, et le soir, assis près d’un bon feu decheminée, nous ...
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