Anton TchekhovSalle 6Chez la maréchale de noblesseLe 1er février de chaque année, le jour de saint Trîphone, martyr, il y a, dans le biende l’ancien maréchal de la noblesse, Trîphone Lvôvitch Zaviaziâtov, un mouvementinaccoutumé. Ce jour-là, jour de la fête du défunt, sa veuve, Lioubov Pétrôvna, faitdire pour lui un service, suivi d’un T e D e u m.Tout le district accourt à ce service. On y voit le maréchal actuel de la noblesse,Kroûmov ; le président de la commission du zemstvo, Marphoûtkine ; Potrakov,membre permanent du bureau pour les affaires des paysans ; les juges de paix desdeux circonscriptions ; le chef du district, Krinolînov ; les deux commissaires depolice ; le médecin du zemstvo, Dvorniâguine, fleurant l’iodoforme ; tous lespropriétaires grands et petits des environs, etc. En tout cinquante personnes.À midi précis, les invités, allongeant leurs figures, viennent de toutes les chambresde la maison se réunir dans la grande salle. Bien que le plancher soit couvert detapis et que les pas ne fassent aucun bruit, la solennité de la circonstance forceinstinctivement chacun à marcher sur la pointe des pieds, en balançant les bras…Dans la salle, tout est prêt. Le père Eumène, petit vieux, en haute calotte de veloursdéteint, endosse une chasuble noire. Le diacre Konkôrdiév, rouge comme uneécrevisse, déjà revêtu des habits sacerdotaux, tourne doucement les pages d’unrituel et en marque certaines avec des bouts de papier. Sur la porte ...
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