— Ô conquérants, guerriers, héros, faiseurs de cendres,Vous les Nemrods, chasseurs géants, les Alexandres,Vous qu'on nomme Alaric, Cyrus, Gengis, Timour,Vous que la mort berça, petits, avec amour,Et qui, grands, et marchant dans les apothéoses,Ainsi qu'avril fait naître autour de lui des roses,Avez fait sous vos pas éclore des tombeaux ;Vous que l'homme, par vous dévoré, trouve beaux ;Nous qu'il trouve hideux et qui sommes vos frères,Nous qui sommes les noirs bénisseurs funéraires,Les prêtres, nous avons à vous dire ceci.Écoutez. Notre gîte auguste fut saisi,Comme le vôtre, hélas, par la raison humaine ;Nous avions, comme vous, les peuples pour domaine,Et nous rôdions sur eux, puissants, l'œil en arrêt,Vainqueurs, toute la terre étant notre forêt ;Et nous disions à Dieu : C'est par nous que tu frappes !Car vous êtes les rois, mais nous sommes les papes ;Vous êtes Attila, nous sommes Borgia.Nous avons la madone et la panagia,L'idole, comme, vous, vous avez la bataille ;Princes, nous n'avons pas tout à fait votre taille,Nous sommes le danger qui se met à genoux,Vous grondez plus que nous, nous rampons mieux que vous ;On sent notre velours, pire que votre griffe ;Nous sommes Anitus, Torquemada, Caïphe.Une grande tiare est sur nos fronts étroits.Urbain huit, Sixte quint, Paul trois, Innocent trois,Gerbert, l'âme livrée aux sombres aventures,Dicatus, inventant les quatorze tortures,Judas buvant le sang que Jésus-Christ suait,La ...
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