Léon Dierx — Poèmes et poésiesSoleil couchantAux bords retentissants des plages écumeusesPleines de longs soupirs mêlés de lourds sanglots,Sous le déroulement monotone des flots ;Près des gouffres remplis des falaises brumeuses ;À l'heure où le soleil, ainsi qu'un roi cruelQui veut parer de draps sanglants ses funérailles,Se déchire et secoue au dehors ses entrailles ;À l'heure où lentement l'ombre envahit le ciel ;Un homme se tenait silencieux. La côteétait déserte. Lui, debout, d'un oeil amerIl regardait tomber l'astre rouge à la mer ;Et sa pensée aussi déferlait, sombre et haute.Ah ! Ce n'était pas l'homme au sortir de l'Eden,Fils encore innocent d'une race nouvelle ;En qui la vie afflue, à qui Dieu se révèle,Et qui pour tous les maux n'a qu'un mâle dédain ;L'homme essayant sa force au seuil des premiers âges,Libre dans l'univers libre et grand comme lui ;Défiant l'avenir, et dont l'oeil éblouiReflète l'horizon des vierges paysages ;Plein d'un orgueil sans peur et d'un espoir sans fin ;Et dans sa beauté fière à qui tout se confie,Sur la création odorante et raviePassant majestueux sous un signe divin ;C'était l'homme vieilli des races séculaires,Fils de la lassitude et des labeurs déçus,Et qui, désabusé des dons qu'il a reçus,A des printemps plus froids que les hivers polaires ;Qui, remuant la cendre immense du passé,Initié tout jeune au mensonge des rêves,A vu la vanité de ses luttes sans trêves,Et sans but désormais s'en va le front ...
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