Théodore Agrippa d’AubignéLes TragiquesLibrairie des Bibliophiles, 1872 (pp. 31-74).LIVRE PREMIER——MISERES>uisqu’il faut s’attaquer aux légions de Rome,Aux monstres d’Italie, il faudra faire commeHannibal, qui, par feux d’aigre humeur arrosez,Se fendit un passage aux Alpes embrazez.Mon courage de feu, mon humeur aigre et forte,Au travers des sept monts fait breche au lieu de porte.Je brise les rochers et le respect d’erreurQui fit douter Cæsar d’une vaine terreur.Il vit Rome tremblante, affreuse, eschevelée,Qui, en pleurs, en sanglots, mi-morte, désolée,Tordant ses doigts, fermoit, deffendoit de ses mainsA Cæsar le chemin au lieu de ses germains.Mais dessous les autels des idoles j’adviseLe visage meurtry de la captive Eglise,Qui à sa delivrance (aux despens des hazards)M’appelle, m’animant de ses trenchants regards.Mes desirs sont des-ja volez outre la riveDu Rubicon troublé ; que mon reste les suivePar un chemin tout neuf, car je ne trouve pasQu’autre homme l’ait jamais escorché de ses pas.Pour Mercures croisez, au lieu de Pyramides,J’ay de jour le pilier, de nuict les feux pour guides.Astres, secourez-moy ; ces chemins enlacezSont par l’antiquité des siecles effacez,Si bien que l’herbe verde en ses sentiers accrüeEst faicte une prairie espaisse, haute et drüe.Là où estoient les feux des Prophetes plus vieux,Je tends comme je puis le cordeau de mes yeux,Puis je cours au matin, de ma jambe arrosséeJ’esparpille à costé la premiere ...
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