Casimir Delavigne — Les MesséniennesLIVRE TROISIÈME[1]Le Vaisseau Naples. Par les flots balancée, une barque légèreHier m'avait porté sur ce vaste vaisseauQui fatiguait le golfe et sa vaine colèreD'un inébranlable fardeau.Ses longs mâts dans les deux montaient en pyramides :Comme un serpent ailé, leur flamme au sein des airsDéroulait ses anneaux rapides,Et j'admirais ce noir géant des mers,Armé d'un triple rang de bronzes homicides,Qui sortaient à demi de ses flancs entr'ouverts.Ces mots : Demain ! demain ! ce doux nom de la Grèce,Volent débouche en bouche : on s'agite, on s'empresse.L'un, penché sur les ponts, aux câbles des sabordsEnchaîne les foudres roulantes ;L'autre court, suspendu sur les vergues tremblantes,Où la voile, en criant, cède à ses longs efforts.Leur chef le commandait, et son regard tranquilleDe la poupe à la proue errait de tous côtés,Avant d'abandonner cette masse immobileAu souffle des vents irrités.Ainsi, prêt à quitter les sphères immortelles,Pour ravir une proie au vautour furieux,L'aigle, tranquille et fier, se mesure des yeux,Essaie, eu les ouvrant, si ses ongles fidèlesA sa colère obéiront encor,Et, pour battre les airs, étend deux fois ses ailesAvant de prendre son essor.Témoin de ces apprêts, debout sous la misaine,Il part, disais-je, il part ; mais doit-il affranchirLes généreux enfants de Sparte et de Mécène ?Doit-il sous un pacha les contraindre à fléchir ?Pour qui grondera son tonnerre ?A ce peuple ...
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