Victor Hugo — Odes et BalladesLe DévouementIn urbi omne mortalium genus vis pestilentiae depopulabatur, nulla coeliintemperie quae occurreret oculis. Sed domus corporibus exanimis, itinerafuneribus complebantur ; non sexus, non aetas periculo vacua.TACITE.Dans la ville, la peste dévorait tout ce qui meurt ; aucun nuage dans le ciel nes'offrait aux yeux ; mais les maisons étaient pleines de corps sans vie, les voies defunérailles. Ni le sexe ni l'âge n'étaient exempts du péril. IJe rends grâce au Seigneur : il m'a donné la vie !La vie est chère à l'homme, entre les dons du ciel ;Nous bénissons toujours le Dieu qui nous convieAu banquet d'absinthe et de miel.Un noeud de fleurs se mêle aux fers qui nous enlacent ;Pour vieillir parmi ceux qui passent,Tout homme est content de souffrir ;L'éclat du jour nous plaît ; l'air des cieux nous enivre.Je rends grâce au Seigneur : - c'est le bonheur de vivreQui fait la gloire de mourir !Malheureux le mortel qui meurt, triste victime,Sans qu'un frère sauvé vive par son trépas,Sans refermer sur lui, comme un Romain sublime,Le gouffre où se perdent ses pas !Infortuné le peuple, en proie à l'anathème,Qui voit, se consumant lui-même,Périr son nom et son orgueil,Sans que toute la terre à sa chute s'incline,Sans qu'un beau souvenir reste sur sa ruine,Comme un flambeau sur un cercueil ! IIQuand Dieu, las de forfaits, se lève en sa colère,Il suscite un Fléau formidable aux cités ...
Voir