La Vérité, lumière effrayée, astre en fuite,Évitant on ne sait quelle obscure poursuite,Après s'être montrée un instant, disparaît.Ainsi qu'une clarté passe en une forêt,Elle s'en est allée au loin dans l'étendue,Et s'est dans l'infini mystérieux perdue,Mêlée à l'ouragan, mêlée à la vapeur,Sombre, et de leur côté les hommes ont eu peur.Peur d'elle, comme elle a peur des hommes peut-être.Son effacement laisse obscure la fenêtreOuverte dans notre âme et béante au milieuDe l'ombre où l'épaisseur du temple cache Dieu.Maintenant il fait nuit, le mensonge est à l'aise.Cependant, par moments, sur la noire falaise,D'où l'on voit l'inconnu sans borne, et les roulisDu firmament tordant les astres dans ses plis,Sommet d'où l'on entend Dieu tourner son registre,Et d'où l'on aperçoit le modelé sinistreDes mondes ignorés, des vagues univers,L'un pour l'autre effrayants parce qu'ils sont divers,Faîte où les visions se confrontent entr'elles,Où les réalités, pour nous surnaturelles,Semblent avoir parfois la figure du mal,Du haut de cette cime appelée Idéal,Par instants un chercheur fait l'annonce sacrée,Et dit : — La Vérité, qui guide, échauffe et crée,Haute lueur par qui l'âme s'épanouit,Vivants, va revenir bientôt dans votre nuit ;Attendez-la. Soyez prêts à la voir paraître. —La terre alors se met à rire ; alors le prêtre,Alors le juge, alors le reître, alors le roi,Quiconque vit d'erreur, d'imposture et d'effroi,Dracon au nom des lois, Tibère au nom ...
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