Victor de Laprade — Poèmes évangéliquesLa Tentation IEsprits immaculés d'amour et de lumière,Astres vêtus encor de la candeur première,Séraphins dans l'extase à jamais absorbés,Vous qui ne luttez pas et n'êtes pas tombés,Sphères où ne croît pas l’arbre de la science,Votre bonheur, là-haut, n’est qu’une longue enfance !Mais, aujourd'hui, troublant votre sérénité,D’ici-bas jusqu’à vous quel nuage est monté ?Est-ce bien que la terre, objet d’inquiétudes,Doux astres, vous distrait de vos béatitudes ?Vos habitants, rêveurs comme sont les humains,Laissent la harpe d’or languir entre leurs mains,Et, du haut des soleils que l’azur nous dérobe,Curieux et craintifs se penchent vers ce globe.Tels, du sommet des tours, dans les plaines, là-bas,Les enfants des guerriers regardent les combats,Et, devant la mêlée à leur âge interdite,Sentent confusément que leur destin s’agite.Ainsi l’aspect de l’homme et ce monde orageuxVous détournent souvent de vos célestes jeux.Or, jamais plus émus, plus tremblants qu’à cette heure,Vous n’avez contemplé la terrestre demeure.Tant d’étoiles jamais dans leur rayonnement,Jamais tant de regards tombés du firmament,Depuis les jours d’Adam et des premières larmes,N’ont cherché notre terre avec autant d’alarmes ;Moins nombreux et moins vifs, ces feux dont l’éther luitScintillent dans l’azur de la plus belle nuit.IIC’est sur un bourg obscur que ces rayons affluent,C’est un seuil indigent que les anges saluent,C’est ...
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