La prise de Marseille I (Malherbe)

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François de Malherbe — O d e s
La prise de Marseille I
ODE
AU ROI HENRI-LE-GRAND,
Sur la réduction de Marseille à l'obéissance de ce roi,
sous les ordres du duc de Guise, Gouverneur de Provence.
1596.
Enfin, ...
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François de MalherbeOdes
La prise de Marseille I
ODE AU ROI HENRI-LE-GRAND, Sur la réduction de Marseille à l'obéissance de ce roi, sous les ordres du duc de Guise, Gouverneur de Provence. 1596.
Enfin, après tant d'années, Voici l'heureuse saison Où nos misères bornées Vont avoir leur guérison. Les dieux, longs à se résoudre, Ont fait un coup de leur foudre Qui montre aux ambitieux Que les fureurs de la terre Ne sont que paille et que verre A la colère des cieux.
Peuples, à qui la tempête A fait faire tant de vœux, Quelles fleurs à cette fête Couronneront vos cheveux ? Quelle victime assez grande Donnerez-vous pour offrande ? Et quel Indique séjour Une perle fera naître D'assez de lustre pour être La marque d'un si beau jour ?
Cet effroyable colosse, [1] Cazaux, l'appui des mutins, A mis le pied dans la fosse Que lui cavoient les destins. Il est bas, le parricide : [2] Un Alcide, fils d'Alcide, A qui la France a prêté Son invincible génie, A coupé sa tyrannie D'un glaive de liberté.
Les aventures du monde Vont d'un ordre mutuel, Comme on voit au bord de l'onde Un reflux perpétuel. L'aise et l'ennui de la vie Ont leur course entresuivie Aussi naturellement Que le chaud et la froidure ; Et rien, afin que tout dure, Ne dure éternellement.
Cinq ans Marseille, volée A son juste possesseur, Avoit langui désolée Aux mains de cet oppresseur. Enfin le temps l'a remise En sa première franchise ; Et les mauxu'elle enduroit
Ont eu ce bien pour échange, Qu'elle a vu parmi la fange Fouler ce qu'elle adoroit.
Déjà tout le peuple more A ce miracle entendu ; A l'un et l'autre Bosphore Le bruit en est répandu : Toutes les plaines le savent Que l'Inde et l'Euphrate lavent ; Et déjà, pâle d'effroi, Memphis se pense captive, Voyant si près de sa rive [3] Un neveu de Godefroi.
1. ↑Charles Cazaux, consul de Marseille, s'étant rendu maître absolu dans cette ville, avec Louis d'Aix, avoit appelé les Espagnols à son secours, pour se maintenir contre les forces du roi, commandées par le duc de Guise. 2. ↑Charles, fils de Henri, surnommé le Balafré. 3. ↑ Le duc de Guise, sorti de la maison de Lorraine, qui prétend tirer son origine de Godefroi de Bouillon.
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