Francis JammesL’Ermite (Jammes)La Nouvelle Revue Française, Tome XVI, 1921 (pp. 31-35).L’ERMITE(SATIRE PREMIÈRE)Sur le sentier du plus âpre des bois,Tel qu’un flâneur distrait qui ne me voit,Le poil bouffant, vint tranquille vers moiUn renard. J’eus comme un léger émoiQui se changea vite en éclat de rireLorsque aussi prompt qu’une brise qui vireIl s’en alla si bien que je l’admireDans ma pensée où je vois encor luireSa queue. Et tout autour j’entends bruireLe cliquetis des arbres dépouillés.Ô mon renard ! ami des prés mouillés,Cadres brillants des coqs aux chants rouillésDont l’orgueil fou trahit les poulaillers,C’est bien à toi que semblait ma JeunesseLorsqu’elle allait d’un pied plein de finesse,Faisant glisser de tous côtés son œilEt prête à fuir l’ombre d’un écureuil !Cette Jeunesse elle est dans ma pensée.Ainsi que toi, renard, elle est passéeSur le chemin des bois où les penséesEt l’ancolie au printemps sont poussées.Et maintenant, dans l’automne froissée,Elle s’en va sur les mousses tassées32 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISEEt comme si, d'alors jusqu'aujourd'hui, Ce ne fût pas plus long que lorsque a lui, Unsimple instant, le beau renard poli.Je ne saurais pleurer comme vous faites. Doux rabâcheurs que l'on nomme poètes.Que vous soye:{ Horace ou bien Ronsard, Je ne saurais pleurer avec votre art Surcette rose au soir fanée. Et puisque Elle est fanée, et qu'il n'est plus de risqueQu'elle retourne à son rosier, je veux Me réjouir autant ...
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