Paul VerlaineTome IeVanier, 1902 (3 éd.) (pp. 411-416).DON JUAN PIPÉÀ François Coppée. Don Juan qui fut grand Seigneur en ce mondeEst aux enfers ainsi qu’un pauvre immondePauvre, sans la barbe faite, et pouilleux,Et si ce n’étaient la lueur de ses yeuxEt la beauté de sa maigre figure,En le voyant ainsi quiconque jureQu’il est un gueux et non ce héros fierAux dames comme aux poêles si cherEt dont l’auteur de ces humbles chroniquesVous va parler sur des faits authentiques.Il a son front dans ses mains et paraîtPenser beaucoup à quelque grand secret.Il marche à pas douloureux sur la neige,Car c’est son châtiment que rien n’allègeD’habiter seul et vêtu de légerLoin de tout lieu où fleurit l’orangerEt de mener ses tristes promenadesSous un ciel veuf de toutes sérénadesEt qu’une lune morte éclaire assezPour expier tous ses soleils passés.Il songe. Dieu peut gagner, car le DiableS’est vu réduire à l’état pitoyableDe tourmenteur et de geôlier gagéPour être las trop tôt, et trop âgé.Du Révolté de jadis il ne restePlus qu’un bourreau qu’on paie et qu’on molesteSi bien qu’enfin la cause de l’EnferS’en va tombant comme un fleuve à la mer,Au sein de l’alliance primitive.Il ne faut pas que cette honte arrive.Mais lui, don Juan, n’est pas mort et se sentLe cœur vif comme un cœur d’adolescentEt dans sa tête une jeune penséeCouve et nourrit une force amassée ;S’il est damné, c’est qu’il le voulut bien,Il avait tout pour être un bon chrétien,La ...
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