PENSÉESESSAIS ET MAXIMESDE J. JOUBERT.[1]TITRE PRÉLIMINAIRE .L’AUTEUR PEINT PAR LUI-MÊME.——J’ai donné mes fleurs et mon fruit : je ne suis plus qu’un tronc retentissant ; maisquiconque s’assied à mon ombre et m’entend, devient plus sage.Je ressemble en beaucoup de choses au papillon : comme lui j’aime la lumière ;comme lui j’y brûle ma vie ; comme lui j’ai besoin, pour déployer mes ailes, quedans la société il fasse beau autour de moi, et que mon esprit s’y sente environnéet comme pénétré d’une douce température, celle de l’indulgence ; j’ai l’esprit et lecaractère frileux.J’ai besoin que les regards de la faveur luisent sur moi. C’est de moi qu’il est vraide dire : « qui plaît est roi, qui ne plaît plus n’est « rien. » je vais où l’on me désirepour le moins aussi volontiers qu’où je me plais.J’ai de la peine à quitter Paris, parce qu’il faut me séparer de mes amis, et de lapeine à quitter la campagne, parce qu’il faut me séparer de moi.J’ai la tête fort aimante et le cœur têtu. Tout ce que j’admire m’est cher, et tout cequi m’est cher ne peut me devenir indifférent.Philanthropie et repentir est ma devise.J’aime peu la prudence si elle n’est morale. J’ai mauvaise opinion du lion depuisque je sais que son pas est oblique. Quand mes amis sont borgnes, je les regarde de profil.Je ne veux ni d’un esprit sans lumière, ni d’un esprit sans bandeau. Il faut savoirbravement s’aveugler pour le bonheur de la vie.Au lieu de me plaindre de ce que la rose a ...
PENSÉES ESSAIS ET MAXIMES DE J. JOUBERT. TITRE PRÉLIMINAIRE [1 .] L’AUTEURPEINTPARLU-IMÊME. —— J’aidonnémeslfeursetmonrfuti:jenesuisplusqu’unrtoncretenitssant;mais quiconque s’assied à mon ombre et m’entend, devient plus sage. Jeressembleenbeaucoupdechosesaupapillon:commeluij’aimelalumière; commeluij’ybrûlemavie;commelui’jaibesoin,pourdéployermesailes,que danslasociétéilfassebeauautourdemoi,etquemonesptirs’ysenteenvironné etcommepénértéd’unedoucetempérature,celledeli’ndulgencej;’ai’lesprtietle caractèrelirfeux. J’aibesoinquelesregardsdelafaveurluisentsurmoi.C’estdemoiqui’lestvrai dedire:«quiplatîestroi,quineplaîtplusn’est«rien.»jevaisoù’lonmedésire pourlemoinsaussivolonitersqu’oùjemeplais. J’aidelapeineàquttierParis,parcequ’lifautmeséparerdemesamis,etdela peineàquttierlacampagne,parcequi’lfautmeséparerdemoi. J’ailatêtefortaimanteetlecœurtêtu.Toutceque’jadmirem’estcher,ettoutce quim’estchernepeutmedevenirindifféren.t Phlianthropieetrepenit r est ma devise. J’aimepeulaprudencesiellen’estmorale.J’aimauvaiseopinionduilondepuis quejesaisquesonpasestobilque.Quandmesamissontborgnes,jelesregardedeprofli. Jeneveuxnid’unesprtisanslumière,nid’unespirtsansbandeau.Ilfautsavoir bravement s’aveugler pour le bonheur de la vie. Auileudemeplaindredecequelaroseadesépines,jemeféilcitedeceque l’épine est surmontée de roses et de ce que le buisson porte des fleurs. lIn’yapointdebontonsansunpeudeméprisdesaurtes.Or,lim’estimpossible demépirseruninconnu. Lestournurespropresàlaconifdencemesontfamliières,maisnonpascellesqui sontpropresàlafamliiairté. *Jen’aijamaisappirsàpalrermal,àinjurieretàmaudire. Ji’mitelacolombe:souventjejetteunbrind’herbeàlafourmiquisenoie. Quandjeramassedescoquillagesetquej’ytrouvedesperles,’jexrtaislespelres et je jette les coquillages. S’ilfallaitchoisi,rj’aimeraismieuxlamollessequilaisseauxhommesletempsde devenirmellieurs,quelasévértiéquilesrendpires,etlaprécipitaitonquin’attend pas le repentir. J’aime encore mieux ceux qui rendent le vice aimable que ceux qui dégradent la vertu. Quand je casse les vitres, je veux qu’on soit tenté de me les payer. Lapeinedeladisputeenexcèdedebienloin’lutlitié.Toutecontestaitonrend ’lesprtisourd,etquandonestsourdj,esuismuet. Jen’appellepasraisoncetteraisonbrutalequiécrasedesonpoidscequiestsaint etcequiestsacré;cetteraisonmalignequiseréjouitdeserreursquandellepeut lesdécouvirr;cetteraisoninsensibleetdédaigneusequiinsutleàlacrédultié. *Labontéd’aurtuimefatiautantdeplaisirquelamienne. Mesdécouvertes,etchacunalessiennes,m’onrtamenéauxpréjugés. Monâmehabtieunlieuparoùlespassionsontpassé:jelesaitoutesconnues. J’aipassélefleuved’oubil. Lechemindelavértié!J’yaifatiunlongdétour;aussilepaysoùvousvouségarez m’est bien connu. Larévoluitonachassémonespritdumonderéelenmelerendantrtophorirble. Mais,eneffe,tquelestmonart?Quelestlenomquiledistinguedesaurtes? Quelleifnsepropose--til?Quefai-tilnaîrteetexister?Queprétends-jeetqueveux-jeenl’exerçant?Est-ced’écirreengénéraletdem’assurerd’êtrelu,seule ambiitondetantdegens?es-tcelàtoutcequejeveux?nesuisj-equ’un polymathiste , ouaij-euneclassed’idéesquisoitfacileàassigneretdonton puissedéterminerlanatureetlecaractère,lemértieetl’utilité?C’estcequ’lifaut examinerattenitvemenl,tonguementetjusqu’àcequejelesache. J’aurairêvélebeau,commelisdisentqui’lsrêventlebonheur.Maislemienestun rêvemeilleu,rcarlamortmêmeetsonaspect,loind’entroublerlacontinutié,lui donnentplusd’étendue.Cesonge,quisemêleàtouteslesveliles,àtouslessang-rfoids,etquisefortfiiedetouteslesrélfexions,aucuneabsence,aucunepertene peuventencauserli’nterruptiond’unemanièreirréparable. Je suis propre à semer, mais non pas à bâtir et à fonder. Le ciel n’a mis dans mon intelligence que des rayons, et ne m’a donné pour éloquencequedebeauxmots.Jen’aideforcequepourm’éleve,retpourvertu qu’unecertaineincorrupitbiilté. Je suis, comme Montaigne, impropre au discours continu. J’ai souvent touché du bout des lèvres la coupe où était l’abondance ; mais c’est uneeauquim’atoujoursfu.i Jesuiscommeuneharpeéoilenne,quirendquelquesbeauxsons,maisqui n’exécuteaucunair.Aucunventconstantn’asoufflésurmo.i Jepassemavieàchasserauxpapllions,tenantpourbonneslesidéesquise rtouventconformesauxcommunes,eltesaurtesseulementpourmiennes. CommeDédale,jemeforgedesalies;jelescomposepeuàpeu,enyattachant une plume chaque jour. Monesptiraimeàvoyagerdansdesespacesouverts,etàsejouerdansdeslfots delumière,oùlin’aperçoitiren,maisoùilestpénétrédejoieetdeclarté.Etque suis-je…, qu’un atome dans un rayon ? Meseffluvionssontlesrêvesd’uneombre. Jeressembleaupeupile,rcetarbrequiatoujours’lairjeune,mêmequandilest vieux. Jerendsgrâceaucieldecequi’lafatidemonesptirunechoselégère,etquiest propreàs’éleverenhau.tMadameVictoirneDeChâtenaydisaitdemoique’javaisl’aird’uneâmequia renconrtéparhasarduncorps,etquis’entirecommeellepeut.Jenepuis disconvenir que ce mot ne soit juste. J’aime,comme’lalouette,àmepromenerloinetau-dessusdemonnid. Dansmeshabtiations,jeveuxqu’lisemêletoujoursbeaucoupdecieletpeude terre. Mon nid sera d’oiseau, car mes pensées et mes paroles ont des ailes. Oh!quli’estdifficlied’êrteàlafoisingénieuxetsensé!J’aiétéprivélongtemps desidéesquiconvenaientàmonesptir,oudulangagequiconvenatiàcesidées. Longtemps’jaisupportélestourmentsd’uneféconditéquinepeutpassefairejour. *lIfautàmonesprtidesentraves,commeauxpiedsdeceLégerducontedes Fées,quandilvoulatiatteindre. Jen’aimelaphliosophie,etsurtoultamétaphysique,niquadrupèdenibipède;jela veux ailée et chantante. Vousallezàlavértiéparlapoésie,etj’arirveàlapoésieparlavétiré. On peut avoir du tact de bonne heure et du goût fort tard ; c’est ce qui m’est arrivé. J’aime peu de tableaux, peu d’opéras, peu de statues, peu de poëmes, et cependant’jaimebeaucouplesarts. Ah ! si je pouvais m’exprimer par la musique, par la danse, par la peinture, comme jem’expirmeparlaparole,combienj’auraisdi’déesquejen’aipas,etcombiende sentiments qui me seront toujours inconnus ! Toutcequimeparaîtfauxn’existepaspourmoi.C’estpourmonespirtdunéantqui neluioffreaucunepirse.Aussinesaurais-jelecombattrenileréfuter,sicen’esten ’lassimilantàquelquechosed’existant,etenraisonnantparquelquevoiede comparaison. Lesclartésordinairesnemesuffisentplusquandlesensdesmotsn’estpasaussi clairqueleurson,c’es-tà-direquandilsn’offrentpasàmapenséedesobjetsaussi rtansparentspareux-mêmesquelestermesquilesdénommen.t J’aifortétroitecetteparitedelatêtedestinéeàrecevoirleschosesquinesontpas claires. Pourquoimefaitgué-jetantàpalrer?C’estque,lorsquejepalre,uneparitedemes ifbressemetenexercice,tandisquel’autredemeuredans’laffaissement;cellequi agitsupporteseulelepoidsdel’action,dontelleestbientôtaccablée;liyaen mêmetempsdisirtbutioninégaledeforcesetinégaledistribuitond’acitvité.Delà, fatiguetotale,lorsquecequiétatifortesftatigué;caralorslafaiblesseestpartou.t Quand je luis… je me consume. Jenepuisfairebienqu’aveclenteuretavecuneextrêmefaitgue.Derrièrema faiblesseliyadelaforce;lafaiblesseestdansli’nstrument.Derrièrelaforcede beaucoupdegens,liyadelafaiblesse.Elleestdanslecœur,danslaraison,dans lertoppeudefranchebonnevolonté. J’aitropdecervellepourmatête;ellenepeutpasjoueràl’aisedanssonétui. J’aibeaucoupdeformesd’idées,maisrtoppeudeformesdephrases. Entouteschoses,ilmesemblequelesidéesintermédiairesmemanquen,tou m’ennuient trop. J’ai voulu me passer des mots et les ai dédaignés : les mots se vengent par la difficutlé. S’liestunhommetourmentéparlamaudtieambiitondemettretoutunlivredans unepage,touteunepagedansunephrase,etcettephrasedansunmo,tc’estmo.i Decertainesparitesnaissentnaturellementtropfiniesenmoipourquejepuisse medispenserdeifnirdemêmetoutcequidotilesaccompagne.rJesaistropce que je vais dire, avant d’écrire. L’attentionestsoutenue,danslesvers,par’lamusementdel’oreille.Laprosen’a pascesecours;pourrati-elle’lavoir?J’essaie;maisjecroisquenon. Jevoudraistirertousmeseffetsdusensdesmots,commevouslestirezdeleur son;deleurchoix,commevousdeleurmuitltude;deleurisolementlui-même, commevousdeleursharmonies;désirantpourtantaussiqu’ilyatienrteeuxde ’lharmonie,maisuneharmoniedenatureetdeconvenance,nond’industire,depur mélangeoud’enchaînemen.t Ignorants, qui ne connaissez que vos clavecins ou vos orgues, et pour qui les applaudissements sont nécessaires, comme un accompagnement sans lequel vos accordsseraientincomplets,jenepuispasvousimtier.Jejouedelalyreantique, nondecelledeTimothée,maisdelalyreàrtoisouàcinqcordes,delalyre d’Orphée,cettelyrequicauseautantdeplaisiràceluiquilatientqu’àceuxquile regarden,tcarilestcontenudanssonair,ilestforcéàs’écouter;ils’entend,lise juge, il se charme lui-même. Ondiraquejepalreavecsubtliité.C’estquelquefoisleseulmoyendepénétraiton que’lespirtatiensonpouvoir,sotiparlanaturedelavértiéoùilveutatteindre,soit parcelledesopinionsoudesignorancesautraversdesquellesliestréduità s’ouvrir péniblement une issue. J’aimeàvoirdeuxvértiésàlafois.Toutebonnecomparaisondonneà’lesprticet avantage. J’ai toujours une image à rendre, une image et une pensée, deux choses pour une etdoubletravailpourmo.i Ce n’est pas ma phrase que je polis, mais mon idée. Je m’arrête jusqu’à ce que la gouttedelumièredont’jaibesoinsoiftorméeettombedemaplume. Jevoudraismonnayerlasagesse,c’est-à-direlarfapperenmaximes , en proverbes , en sentences facilesàreteniretàtransmetrte.Quenepuis-jedécireret bannirdulangagedeshommes,commeunemonnaieatlérée,lesmotsdontlis abusent et qui les trompent ! Je voudrais faire passer le sens exquis dans le sens commun, ou rendre commun le sens exquis. J’avaisbesoindel’âgepourapprendrecequejevoulaissavoi,ret’jauraisbesoin de la jeunesse pour bien dire ce que je sais. Lecieln’avaitdonnédelaforceàmonesprtiquepouruntemps,etcetempsest passé. Les hommes sont comptables de leurs actions ; mais moi, c’est de mes pensées que’jauraiàrendrecompte.Ellesneserventpasseulementdefondementàmon ouvrage, mais à ma vie. Mes idées ! C’est la maison pour les loger qui me coûte à bâtir. Leveràsoieiflesescoques,etjelifelesmiennes;maisonnelesdéviderapas. CommeliplairaàDieu! TITRE PREMIER. DE DIEU, DE LA CRÉATION, DE L’ÉTERNITÉ, DE LA PIÉTÉ, DE LA RELIGION, DES LIVRES SAINTS ET DES PRÊTRES. —— I. Dieuesttellementgrandettellementvaste,que,pourlecomprendre,ilfautle diviser. II. Danscetteopérationdi’maginerDieu,lepremiermoyenestlaifgurehumaine,le derniertermelalumière,e,tdanslalumière,lasplendeu.rJenesaissi l’imaginaitonpeutallerplusloin;mais’lesprtipoursuitquandelles’arrête; ’létendueseprésenteàlu,ilatoute-puissance,i’lnifnité....Cercleravissantàdécrire etquirecommencetoujours.Onlequtite,onlereprend;ons’yplonge,onensor.t Qui’mportequetoutlemondel’achève?Nortedevoi,rnortebonheursontd’ytenir et non de le tracer. III. OnconnaîtDieuparlapiété,seulemodfiicationdenorteâmeparlaquelleilsotimis ànorteportéeetpuissesemonrterànous. IV.
Nous croyons toujours que Dieu est semblable à nous-mêmes : les indulgents l’annoncent indulgent ; les haineux le prêchent terrible. V. Toutcequiestrtès-spirtiuel,etoù’lâmeavraimentpart,ramèneàDieu,àlapiété. L’âmenepeutsemouvoir,s’évelile,rouvirrlesyeux,sanssenitrDieu.OnsentDieu avec’lâme,commeonsentl’airaveclecorps. VI. *Oserai-jeledire?OnconnaîtDieufacliemen,tpourvuqu’onneseconrtaignepas à le définir. VII. On ne comprend la terre que lorsqu’on a connu le ciel. Sans le monde religieux, le monde sensible offre une énigme désolante. VIII. Tout ce qui présente à l’homme un spectacle dont il ne peut déterminer ni la cause nilesbornes,lecondutià’lidéedeDieu,c’es-tà-diredeceluiquiesitnfini. IX. LeDieudelamétaphysiquen’estqu’uneidée;maisleDieudesreilgions,le Créateurducieletdelaterre,leJugesouveraindesacitonsetdespensées,est une force. X. L’universobéitàDieu,commelecorpsobéitàl’âmequilerempil.t XI. Lemondeaétéfaitcommelatoliede’laraignée:Dieul’atirédesonsein,etsa volonté’lalifé,’ladérouléet’latendu.Cequenousnommonslenéan,testsa pléntiudeinvisible;sapuissanceestunpeloton,maisunpelotonsubstanite,l contenant un tout inépuisable, qui se dévide à chaque instant, en demeurant toujourseniter.Pourcréerlemonde,ungraindematièreasufif;cartoutceque nousvoyons,cettemassequinouseffraie,n’estrienqu’ungrainque’lÉternela crééetmisenœuvre.Parsaducitilté,parlescreuxqui’lenfermeet’lartdel’ouvirer, lioffre,danslesdécorationsquiensontsorties,unesorted’immensité.Toutnous paratîplein,toutestvide,ou,pourmieuxdire,toutestcreux.Lesélémentseux-mêmessontcreux;Dieuseulestplein.Maiscegraindemaitère,oùétati-il?lIétati dans le sein de Dieu, comme il y est présentement. XII. «Riennesefaitderien»,disenli-ts;maislasouverainepuissancedeDieun’est pasiren;elleestlasourcedelamatièreaussibienquecelledel’esprit. XIII. Lemondeestmondeparlaforme;parlefondiln’estrienqu’unatome.Enreitrant sonsouffleàlu,ilecréateurpourratiendésenlferlevolumeeltedértuireaisément. L’univers,danscettehypothèse,n’auraitnidébirsniruines;lideviendraitcequ’li étatiavantletemps,ungraindemétalapla,itunatomedanslevide,bienmoins encore,unnéan.tXIV. Enmettantsanscesselamatièredevantnosyeux,onnousempêchedelavoi.r Vainementonvantel’ouvrierennousétalantlesmerveillesdesonouvrage;la masseoffusque,l’objetdistrati,etlebu,tsanscesseindiqué,estsanscesse impossible à voir. XV. Dieumulitplieli’ntelilgence,quisecommuniquecommelefeu,àl’infin.iAllumez mllieflambeauxàunflambeau,salfammedemeuretoujourslamême. XVI. Dieun’aurai-tlifatilaviehumainequepourencontemplerlecours,enconsidérer lescascades,lejeuetlesvairétés,oupoursedonnerlespectacledemains toujoursenmouvemen,tquisertansmettentunflambeau?Non,Dieunefatiiren quepourl’éterntié. XVII. Norteimmortailténousestrévéléed’unerévélaitoninnéeetinfusedansnotre espirt.Dieului-même,enlecréan,tydéposecetteparole,ygravecettevérité,dont lesrtaitsetlesondemeurentindesrtucitbles.Mais,enceci,Dieunousparletout basetnouslilumineensecre.tIlfaut,pourl’entendre,dusilenceintérieur;lifau,t pour apercevoir sa lumière, fermer nos sens et ne regarder que dans nous. XVIII. Notreâmeesttoujourspleinementvivante;ellel’estdans’linfirme,dans’lévanou,i danslemourant;elle’lestplusencoreaprèslamor.t XIX. lIn’estpermisdeparlerauxhommesdeladesrtucitonquepourlesfairesongeràla durée, et de la mort que pour les faire songer à la vie ; car la mort court à la vie, et la destruction se précipite dans la durée. XX. Nortechairn’estquenotrepulpe;nosos,nosmembranes,nosnerfs,nesontque la charpente du noyau où nous sommes enfermés, comme en un étui. C’est par exfoliationsquel’enveloppecorporellesedissipe;maisl’amandequ’ellecontien,t l’êtreinvisiblequ’elleenserre,demeureindesrtucitble.Letombeaunousdévore, maisnenousabsorbepas;noussommesconsumés,nondétrutis. XXI. Le courroux de Dieu est d’un moment ; la miséricorde divine est éternelle. XXII. La crainte de Dieu nous est aussi nécessaire pour nous maintenir dans le bien, que la crainte de la mort pour nous retenir dans la vie. XXIII. Dieu aime autant chaque homme que tout le genre humain. Le poids et le nombre nesontirenàsesyeux.Éternel,infin,iiln’aquedesamoursimmenses. XXIV. Lecielnenousdotiquecequ’linousdonne,etilnousdonnesouventcequi’lne nousdotipas. XXV. Riendanslemondemoraln’estperdu,commedanslemondematéirelirenn’est anéanit.Toutesnospenséesettousnossentimentsnesontici-basquele commencementdesenitmentsetdepenséesquiserontachevésalileurs. XXVI. Où vont nos idées ? Elles vont dans la mémoire de Dieu. XXVII. Dieu,enlescréan,tpalreauxâmesetauxnatures,etleurdonnedesinstructions dontellesoublientlesens,maisdontl’impressiondemeure.Decetteparoleetde cerayonainsidéposés,linousreste,danslesplusgrandsobscurcissementsde l’âmeetdanslesplusgrandesinattenitonsde’lesprti,uneespècede bourdonnement et de crépuscule qui ne cessent jamais, et nous troublent tôt ou tard dans nos dissipations extérieures. XXVIII. Dieumettra-ti-llesbellespenséesaurangdesbellesactions?Ceuxquilesont cherchées,quis’yplaisentets’yattachent,auronli-tsunerécompense?Le phliosopheetlepoitilqueseroni-tlspayésdeleursplans,commel’hommedebien serapayédesesbonnesœuvres?Etlesrtavauxutliesonli-tsunmértie,auxyeux deDieu,commelesbonnesmœurs?Peu-têrtebien;maislepremierpirxn’est pas assuré comme le second, et ne sera pas le même ; Dieu n’en a pas mis dans nosâmes’lespéranceetlacerittude;d’aurtesmotfisnousdéterminen.tPourtan,tje mereprésentefortbienBossue,tFénelon,Platon,portantleursouvragesdevant Dieu ; même Pascal et La Bruyère, même Vauvenargue et La Fontaine, car leurs œuvrespeignentleurâme,etpeuventleurêrtecomptéesdansleciel.Maisilme semblequeJ-.J.RousseauetMontesquieun’auraientoséyprésenterlesleursli:s n’yontmisqueleurespri,tleurhumeuretleursefforts.QuantàVotlaire,lessiennes lepeignentauss,ietellesluiserontcomptées,jepense,maisàsacharge. XXIX. Dieu a égard aux siècles. Il pardonne aux uns leurs grossièretés, aux autres leurs raffinements.Malconnuparceuxl-à,méconnuparceux-ci,ilmetànortedécharge, danssesbalanceséquitables,lessuperstitionsetlesincrédutilésdesépoquesoù nousvivons.Nousvivonsdansuntempsmalade:illevoti.Norteintelilgenceest blessée:linouspardonnera,sinousluidonnonstoutentiercequipeutnousrester de sain. XXX. lIfautallerauciell;àsontdansleurstypestoutesleschoses,touteslesvétirés,tous lesplaisirs,dontnousn’avonsici-basquelesombres.Telleestlasuprêmebeauté de ce monde, que bien nommer ce qui s’y trouve, ou même le désigner avec exacittude,suffiraitpourformerunbeaustyleetpourfaireunbeauilvre. XXXI. Audelàdumondeetdelavieli,n’yaplusdetâtonnement.lIn’yaqu’inspection,et toutcequ’onregardeestvértié. XXXII. Ilmesemblequedanscetavenirlointaind’uneautrevie,ceuxl-àserontlesplus heureuxquin’aurontpaseudansleurduréeunseulmomentqu’lisnepuissentse rappeler avec plaisir. Là haut, comme ici-bas, nos souvenirs seront une part importante de nos biens et de nos maux. XXXIII. Le ciel est pour ceux qui y pensent. XXXIV. Lapiétéestunesagessesubilme,quisurpassetouteslesaurtes,uneespècede génie,quidonnedesaliesà’lesp.tirNuln’estsagesi’ln’estpieux. XXXV. Lapiétéestuneespècedepudeu.rEllenousfatibaisserlapensée,commela pudeurnousfatibaisserlesyeux,devanttoutcequiestdéfendu. XXXVI. La piété est au cœur ce que la poésie est à l’imagination, ce qu’une belle métaphysiqueestà’lespirt;elleexercetoute’létenduedenortesensibitilé.C’est unsenitmentparlequell’âmereçotiunetellemodiifcation,qu’elleaparluisa rondeurabsolueettoutelaperfecitondontsanatureestsusceptible. XXXVII. *Lapiétéestleseulmoyend’échapperàlasécheressequelertavalidela rélfexionporteinévitablementdanslessourcesdenossensibtiliés. XXXVIII. Il faut aux femmes une piété plutôt tendre que raisonnée, et aux hommes une grave plutôt que tendre piété. XXXIX. Lapiéténousattacheàcequli’yadepluspuissant,quiestDieu,etàcequli’ya deplusfaible,commelesenfants,lesvieillards,lespauvres,lesinfirmes,les malheureuxetlesaffilgés.Sanselle,lavieillessechoquelesyeux;lesinifrmtiés repoussent;li’mbécilltiérebute.Avecelle,onnevoitdanslavieillessequelegrand âge,danslesinfirmitésquelasouffrance,dansi’lmbécillitéquelemalheur;on n’éprouve que le respect, la compassion et le désir de soulager. XL. Lachairtéestuneespècedepiété.Lesdégoûtssetaisenttellementdevantelle, qu’onpeutdireque,pourlespieux,touteslesailffcitonsontdel’atrtai.t XLI. Lareligionfaitaupauvremêmeundevoird’êrteilbéral,noble,généreux, magniifqueparlacharité. XLII. Dieun’apasseulementmisdansl’hommel’amourdesoi,maisaussi’lamourdes autres.Lepourquoidelaplupartdenosquailtés,c’estqu’onestbon,c’estqu’on est homme, c’est qu’on est l’ouvrage de Dieu. XLIII. Aimer Dieu, et se faire aimer de lui, aimer nos semblables et nous faire aimer d’eux:voilàlamoraleetlareilgion;dans’luneetdansl’aurte,’lamouresttout:fin, principe et moyen. XLIV. Dieu veut que nous aimions même ses ennemis. XLV. IlfautrendreleshommesinsatiablesdeDieu;c’estunefaimdontlisseront malheureusementassezdisrtaitsparlespassionsetlesaffaires. XLVI. PenseràDieuestuneaciton. XLVII. IlfautaimerdeDieusesdonsetsesrefus,aimercequi’lveutetcequi’lneveut pas. XLVIII. Dieuaime’lâme,etcommeilyaunarttatiquiporte’lâmeàDieu,liyenaun,si j’oseainsipalrer,quiporteDieuàl’âme.lIfatide’lâmesesdéilces. XLIX. Nous sommes éclairés parce que Dieu luit sur nous, et nous sommes droits parce qu’linoustouche.Dieunouséclairecommelumière;linousredressecommerègle. Cetterègle,nondiscernée,maissenite,sertdepointdecomparaisonànos jugementsdanstoutcequidotiêrteesitméparuneautrevoiequecelledessens. L. Dieu!Etdelàtouteslesvertus,touslesdevoirs.S’ilenestoù’lidéedeDieune sotimêléeli,s’yrtouvetoujoursquelquedéfautouquelqueexcès;ilymanqueoule nombre,oulepoids,oulamesure,touteschosesdont’lexactitudeestdivine. LI. Nousnevoyonsbiennosdevoirsqu’enDieu.C’estleseulfondsurlequellissoient toujourslisiblesàl’espir.t LII. Il n’y a d’heureux que les bons, les sages et les saints ; mais les saints le sont plus quetouslesaurtest,antlanaturehumaineestfaitepourlasainteté. LIII. Le juste, le beau, le bon, le sage est ce qui est conforme aux idées que Dieu a du juste,dubeau,dusageetdubon.ÔtezDieudelahautephliosophie,iln’yaplus aucuneclarté;ilenestlalumièreetlesoleil:c’estluiquililuminetout: i n lumine tuo videbimus lumen. LIV. Rendons-nousagréablesàDieu;onlepeutentouttemps,entoutileu,entoutétat dedécadence.L’estimedeDieu,si’lonpeuts’expirmerainsi,estplusfaclieà obtenirquel’esitmedeshommes,parcequeDieunousitentcomptedenosefforts. LV. Il faut céder au ciel et résister aux hommes. LVI. Nousnousjugeonssuivantlejugementdeshommes,auileudenousjugersuivant le jugement du ciel. Dieu est le seul miroir dans lequel on puisse se connaître ; dans touslesaurtesonnefatiquesevoir.