Madame de La GuettePaul de MussetRevue des Deux Mondes4ème série, tome 26, 1841Madame de La GuetteIIl y avait en 16l2 un gentilhomme d’un âge déjà mûr, qui était une vraie figure de cetemps-là : barbe rousse, moustaches longues, visage maigre, la peau comme duparchemin, l’oeil rond, petit et flamboyant, le justaucorps de buffle, les bottes entoute saison, et la rapière à l’ancienne mode. Il avait vu plus de vingt batailles, etson corps s’était desséché, en plein vent, au service du roi, il était dur et violent, ilse serait fait hacher plutôt que de changer d’opinion sur quoi que ce fût, et levait àtout propos la canne sur ses valets ; il se nommait Meurdrac. A quarante-cinq ans,sa constitution était ruinée par les rhumatismes, il quitta l’armée, et se retira enBrie, près de Gros-Bois, où demeurait le vieux duc d’Angoulême, à qui il avait long-temps appartenu. Ce duc d’Angoulême était le fameux bâtard de Charles IX et deMarie Touchet, dont on a dit qu’il eût été l’un des plus grands hommes de sontemps, s’il eût pu se défaire de l’habitude de voler et de fabriquer de la faussemonnaie.Meurdrac se fit bâtir à Mandres, près de Gros-Bois, une bicoque avec tourelles etgrenouillères, qu’il appela son château, et quand il y eut mis des meubles, il voulutaussi avoir une femme ; on lui trouva une demoiselle de Paris, âgée de vingt-cinqans, jolie, bonne et douce. Ils se marièrent, et, dès le mois de février 1613, le cielleur accorda une petite fille qui eut le ...
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