De l’honneur comme ressort dramatique.Théâtre de Calderon, Rojas, etc.Louis de Viel-CastelRevue des Deux Mondes4ème série, tome 25, 1841Le Théâtre espagnol/05Ce que la fatalité était pour les tragiques grecs, l’honneur l’est en quelque sorte pour les poètes dramatiques de l’Espagne. Ils nous lemontrent comme une puissance mystérieuse planant sur l’existence entière de leurs personnages, les entraînant impérieusement àsacrifier leurs sentiments et leurs penchants naturels, leur imposant tantôt des actes du plus sublime dévouement, tantôt des crimes,des forfaits vraiment atroces, mais qui perdent ce caractère par l’effet de l’impulsion qui les produit, de la terrible nécessité dont ilssont le résultat. L’honneur, pour eux, n’est pas la vertu, en tant du moins qu’on voudrait donner au mot de vertu sa significationchrétienne ; c’est quelque chose de tout-à-fait distinct, souvent même d’absolument contraire, qui semble plutôt se rapprocher desinstincts d’une société encore barbare dans ce qu’ils peuvent avoir de généreux et d’aveugle tout à la fois. Tenir à tout prix la paroleune fois donnée, alors même qu’elle ne peut être tenue qu’en violant les lois de la morale et de la justice, et à bien plus forte raison, sien la donnant on n’a compromis que sa propre existence et ses plus chers intérêts ; défendre, envers et contre tous, la cause, quellequ’elle soit d’ailleurs, de son roi, de son père, de son ami, de tous ceux qu’on est appelé à protéger, soit par la ...
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