Le SongeLucien de SamosateTraduction française d’Eugène Talbot1. J'avais cessé depuis peu d'aller aux écoles, et j'étais déjà grand garçon, lorsquemon père tint conseil avec ses amis sur ce qu'il ferait de moi. Le plus grand nombrefut d'avis que la profession des lettres demandait beaucoup de travail et de temps,des frais considérables, une fortune brillante : or, nos ressources étaient fortminces, et nous allions avoir besoin, avant peu, d'un secours étranger. Si, aucontraire, j'apprenais quelque métier, je pourrais tout d'abord me procurer lenécessaire, et ne plus vivre à la charge de la famille, à l'âge que j'avais. Bientôtmême je serais agréable à mon père, en apportant quelque argent à la maison.2. Le point d'une seconde délibération fut de savoir quel est le métier le meilleur, leplus facile à apprendre, le plus digne d'un homme libre, celui enfin dont lesinstruments sont le plus à portée et qui suffit le plus vite aux besoins. Chacun se mità louer tel ou tel art, suivant son humeur ou ses connaissances ; mais mon pèrejetant les yeux sur mon oncle maternel, qui assistait au conseil, et qui passait pourun statuaire habile et un excellent ouvrier en marbre : "Il n'est pas convenable, dit-il,qu'un autre ait la préférence quand vous êtes là : prenez-moi ce garçon, ajouta-t-ilen me désignant, emmenez-le et faites-en un bon tailleur de pierre, un bon ajusteur,un bon sculpteur ; il le peut, et il a pour cet art, vous le savez, d'heureusesdispositions ...
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