Charles de Saint-ÉvremondŒuvres mêléesJugement sur César et sur AlexandreJUGEMENT SUR CÉSAR ET SUR ALEXANDRE.À Monsieur ***.(1663.)C’est un consentement presque universel, qu’Alexandre et César ont été les plusgrands hommes du monde ; et tous ceux qui se sont mêlés d’en juger, ont cru faireassez pour les conquérants qui sont venus après eux, de trouver quelque rapportentre leur réputation et leur gloire. Plutarque, après avoir examiné leur naturel, leursactions, leur fortune, nous laisse la liberté de décider, qu’il n’a osé prendre.Montaigne, plus hardi, se déclare pour le premier : et, depuis que les versions deVaugelas et d’Ablancourt ont fait de ces héros le sujet de toutes nos1conversations , chacun s’est rendu partisan de l’un ou de l’autre, selon soninclination ou sa fantaisie. Pour moi, qui ai peut-être examiné leur vie avec autantde curiosité que personne, je ne me donnerai pourtant pas l’autorité d’en jugerabsolument. Mais, puisque vous ne voulez pas me dispenser de vous dire ce quej’en pense, vous aurez quelques observations que j’ai faites sur le rapport et ladifférence que j’y trouve.Tous deux ont eu l’avantage des grandes naissances. Alexandre, fils d’un roiconsidérable ; César, d’une des premières maisons de cette république, dont lescitoyens s’estimoient plus que les rois. Il semble que les dieux ayent voulu donner àconnoître la grandeur future d’Alexandre, par le songe d’Olympias, et par quelquesautres présages. Ses inclinations ...
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