Leconte de LislePoèmes antiquesAlphonse Lemerre, éditeur, s.d. (pp. 75-80).G l a u c éISous les grottes de nacre et les limons épaisOù la divine Mer sommeille et rêve en paix,Vers l’heure où l’Immortelle aux paupières doréesRougit le pâle azur de ses roses sacrées,Je suis née, et mes sœurs, qui nagent aux flots bleus,M’ont bercée en riant dans leurs bras onduleux,Et, sur la perle humide entrelaçant leurs danses,Instruit mes pieds de neige aux divines cadences.Et j’étais déjà grande, et déjà la beautéBaignait mon souple corps d’une molle clarté.Longtemps heureuse au sein de l’onde maternelle,Je coulais doucement ma jeunesse éternelle ;Les Sourires vermeils sur mes lèvres flottaient,Les Songes innocents de l’aile m’abritaient ;Et les Dieux vagabonds de la mer infinieDe mon destin candide admiraient l’harmonie.O jeune Klytios, ô pasteur inhumain,Que Pan aux pieds de chèvre éleva de sa main,Quand sous les bois touffus où l’abeille butineIl enseigna Syrinx à ta lèvre enfantine,Et, du flot cadencé de tes belles chansons,Fit hésiter la Vierge au détour des buissons !Ô Klytios ! sitôt qu’au golfe bleu d’HimèreJe te vis sur le sable où blanchit l’onde amère,Sitôt qu’avec amour l’abîme murmurantEut caressé ton corps d’un baiser transparent,Éros ! Éros perça d’une flèche imprévueMon cœur que sous les flots je cachais à sa vue.Ô pasteur, je t’attends ! Mes cheveux azurésD’algues et de corail pour toi se sont parés ;Et déjà, pour bercer notre doux ...
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