Discours de réception à l’Académie française
de Victor de Laprade
Discours de réception à l’Académie française
Anonyme
Victor de Laprade
17 mars 1859
MESSIEURS,
Les choix illustres vous permettent les choix indulgents : c’est ainsi que vous
m’accordez au milieu de vous la place de M. de Musset. Mes seuls titres, vous les
avez créés vous-mêmes, en attribuant à mes derniers écrits un encouragement
solennel. Par une faveur qui m’est aussi chère sans m’être aussi personnelle, vous
avez voulu, dans cette élection, témoigner de votre estime pour un corps dévoué
aux études sévères et qui compte ici des noms glorieux. J’ai retrouvé, sur le seuil
de l’Académie, les patrons éminents qui m’ont ouvert les portes de l’Université ; à
côté d’eux, les maîtres de la poésie ; et je suis heureux de confondre aujourd’hui
dans la même reconnaissance tous ceux qui m’ont fait éprouver les joies de
l’admiration.
Entre ces élus de l’intelligence que notre génération saluait avec tant d’amour, le
plus jeune et le plus vite arrivé à la gloire, Alfred de Musset, était à peine notre aîné.
Quand sur les bancs des écoles nos imaginations s’enivraient de sa première
sève, et plus tard, quand nos âmes s’associaient aux larmes salutaires de son âge
mûr, aurions-nous pensé jamais que l’un de nous serait appelé à commencer pour
lui la postérité, et à parler de ce frère comme d’un ancêtre ?
Moins que tout autre, je devais me croire réservé à lui payer ce douloureux tribut.
Par les années, je me trouvais si ...
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