Discours de réception à l’Académie française
de Saint-Pierre
Discours de réception à l’Académie française
Anonyme
Saint-Pierre
Prononcé le 3 mars 1695
Quelque grand que soit un bienfait, Messieurs, il peut être égalé par des sentiments
de reconnoissance, et heureusement pour ceux qui par leur situation sont obligés
de recevoir, ils ont dans leur cœur de quoi rendre, si leur cœur est assez sensible.
Admis aujourd’hui par vos suffrages dans une compagnie qui tient le premier rang
dans le monde pour les lettres, quel peut être mon devoir, Messieurs, si ce n’est
d’employer toutes mes forces pour vous persuader que quelque considérable que
soit la grace que vous m’avez faite, j’en connois parfaitement le prix, et que mes
sentimens sont tels qu’ils peuvent m’en acquitter.
L’amour des lettres, aussi grand peut-être en moi que dans ceux qui ont le plus fait
d’honneur par leurs écrits, la haute idée que j’ai des beaux arts, et une vénération
qui m’est naturelle pour tout ce qui en porte le caractère, me font sentir le bonheur
d’enter dans une société dont les belles-lettres ont formé les liens et dicté les loix,
qu’elles animent sans cesse de leur esprit, et à qui elles ouvrent tous leurs trésors.
Presque toutes les occupations des hommes portent la marque, ou de la misère de
leur condition, ou de l’aveuglement de leurs passions ; mais les connoissances qui
servent à perfectionner la raison, sont exemptes de ces deux taches. Les plaisirs
qu’on y trouve sont purs, personne ne nous ...
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