Charles de Saint-ÉvremondŒuvres mêléesDe la comédie angloiseDE LA COMÉDIE ANGLOISE.(1677.)Il n’y a point de comédie qui se conforme plus à celle des anciens que l’angloise,pour ce qui regarde les mœurs. Ce n’est point une pure galanterie pleined’aventures et de discours amoureux, comme en Espagne et en France ; c’est lareprésentation de la vie ordinaire, selon la diversité des humeurs et les différentscaractères des hommes. C’est un Alchimiste, qui par les illusions de son art,entretient les espérances trompeuses d’un vain curieux ; c’est une personne simpleet crédule, dont la sotte facilité est éternellement abusée ; c’est quelquefois unPolitique ridicule, grave, composé, qui se concerte sur tout, mystérieusementsoupçonneux ; qui croit trouver des desseins cachés dans les plus communesintentions, qui pense découvrir de l’artifice dans les plus innocentes actions de lavie ; c’est un Amant bizarre, un faux Brave, un faux Savant : l’un, avec desextravagances naturelles ; les autres, avec de ridicules affectations. À la vérité, cesfourberies, ces simplicités, cette politique, et le reste de ces caractèresingénieusement formés, se poussent trop loin, à notre avis, comme ceux qu’on voitsur notre théâtre demeurent un peu languissants, au goût des Anglois ; et cela vientpeut-être de ce que les Anglois pensent trop, et de ce que les François d’ordinairene pensent pas assez.En effet, nous nous contentons des premières images que nous donnent les objets ;et ...
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