De l’Allemagne et de la RévolutionEdgar QuinetRevue des Deux MondesT.5, 1832De l’Allemagne et de la Révolution[1]De l’Allemagne et de la Révolution Un état peut être amené à une telle condition qu’il n’y ait rien à en dire sans paraître accuser à la fois le pouvoir qui l’a faite et le paysqui la supporte. Dans ces époques sans espoir, il faut se taire. Au contraire, il est des temps où, sous une apparence de ruines, seprépare pour un peuple une meilleure fortune. Alors il faut parler. Ces temps, ce sont les nôtres. Si la destinée de la France était dedemeurer ce quelle est aujourd’hui, il ne nous resterait, pour nous, rien à faire qu’à effacer de nous-mêmes ce que nous avons vu dureste de l’Europe, et à endormir solitairement, comme nous pourrions, notre pays sur sa défaite. Nous nous enfermerions avec luidans sa chute, et nous y trouverions encore de quoi nous abuser jusqu’à la fin. Mais si la fatalité qui nous tient depuis un siècle par lamain, nous éclaire de plus en plus notre marche à nous tous, peuple, gouvernement, monarchie, démocratie ; si, après y avoir mieuxpensé ; si, après des séjours et des observations prolongées hors de France, il devient manifeste que ce qui est aujourd’hui notrefaiblesse sera plus tard notre force ; que de notre infirmité naîtra notre puissance, et que tout le péril reste pour le pouvoir actuel, quicherche son salut là où le plus grand nombre voit sa ruine : alors le pire service qu’on ait à rendre à l’état est de lui ...
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