Les Chroniques deGuy de Maupassant(alpha-chrono)Le monastère de CorbaraLe Gaulois, 5 octobre 1880UNE VISITE AU P. DIDON.> Les Alpes ont plus de grandeur que les montagnes de la Corse ; leurs sommetssont toujours blancs, leurs passages presque impraticables, leurs abîmes effrayantsoù l'on entend, sans les voir, rouler des torrents, en font une sorte de domaine duterrible et de l'Escarpé. Les montagnes de Corse, moins hautes, ont un caractèretout différent.Elles sont plus familières, faciles d'accès, et, même dans leurs parties les plussauvages, n'ont point cet aspect de désolation sinistre qu'on trouve partout dans lesAlpes. Puis, sur elles flambe sans cesse un éclatant soleil. La lumière ruissellecomme de l'eau le long de leurs flancs, tantôt vêtus d'arbres immenses, qui de loinsemblent une mousse, tantôt sont nus, montrant au ciel leur corps de granit.Même sous l'abri des forêts de châtaigniers, des flèches de lumière aiguë percentle feuillage, vous brûlent la peau, rendent l'ombre chaude et toujours gaie.Pour aller d'Ajaccio au monastère de Corbara, on peut suivre deux chemins, l'un àtravers les montagnes et l'autre au bord de la mer.Le premier serpente sans fin à mi-côte au milieu d'impénétrables maquis, longedes précipices où l'on ne tombe jamais, domine des fleuves presque sans eau àcette saison, traverse des villages de cinq maisons accrochés comme des nids auxsaillies du roc, passe devant des sources minces, où boivent les voyageurséreintés ...
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