Victor Hugo — Odes et BalladesLa fée et la PériIEnfants ! si vous mouriez, gardez bien qu'un espritDe la route des cieux ne détourne votre âme !Voici ce qu'autrefois un vieux sage m'apprit : -Quelques démons, sauvés de l'éternelle flamme,Rebelles moins pervers que l'Archange proscrit,Sur la terre, où le feu, l'onde ou l'air les réclame,Attendent, exilés, le jour de Jésus-Christ.Il en est qui, bannis des célestes phalanges,Ont de si douces voix qu'on les prend pour des anges.Craignez-les : pour mille ans exclus du paradis,Ils vous entraîneraient, enfants, au purgatoire ! –Ne me demandez pas d'où me vient cette histoire ;Nos pères l'ont contée ; et moi, je la redis.IILA PERIOù vas-tu donc, jeune âme ?... Ecoute !Mon palais pour toi veut s'ouvrir.Suis-moi, des cieux quitte la route ;Hélas ! tu t'y perdrais sans doute,Nouveau-né, qui viens de mourir !Tu pourras jouer à toute heureDans mes beaux jardins aux fruits d'or ;Et de ma riante demeureTu verras ta mère qui pleurePrès de ton berceau, tiède encor.Des Péris je suis la plus belle ;Mes sœurs règnent où naît le jour ;Je brille en leur troupe immortelle,Comme entre les fleurs brille celleQue l'on cueille en rêvant d'amour.Mon front porte un turban de soie ;Mes bras de rubis sont couverts ;Quand mon vol ardent se déploie,L'aile de pourpre qui tournoieRoule trois yeux de flamme ouverts.Plus blanc qu'une lointaine voile,Mon corps n'en a point la pâleur ;En quelque lieu qu'il se dévoile ...
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