Stéphane MallarméDivagationsBibliothèque-Charpentier ; Fasquelle, 1897 (pp. 164-170).HAMLETLoin de tout, la Nature, en automne, prépare son Théâtre, sublime et pur, attendantpour éclairer, dans la solitude, de significatifs prestiges, que l’unique œil lucide quien puisse pénétrer le sens (notoire, le destin de l’homme), un Poëte, soit rappelé àdes plaisirs et à des soucis médiocres.Me voici, oubliant l’amertume feuille-morte, de retour et prêt à noter, en vue de moi-même et de quelques-uns aussi, nos impressions issues de banals Soirs que leplus seul des isolés ne peut, comme il vêt l’habit séant à tous, omettre deconsidérer : pour l’entretien d’un malaise et, connaissant, en raison de certaineslois non satisfaites, que ce n’est plus ou pas encore l’heure extraordinaire. . . . . . . . . . . . . . . .Et cependant, enfant sevré de gloire,Tu sens courir par la nuit dérisoire,Sur ton front pâle aussi blanc que du lait,Le vent qui fait voler ta plume noireEt te caresse, Hamlet, ô jeune Hamlet !(Théodore de Banville.)L’adolescent évanoui de nous aux commencements de la vie et qui hantera lesesprits hauts ou pensifs par le deuil qu’il se plaît à porter, je le reconnais, qui sedébat sous le mal d’apparaître : parce qu’Hamlet extériorise, sur des planches, cepersonnage unique d’une tragédie intime et occulte, son nom même affiché exercesur moi, sur toi qui le lis, une fascination, parente de l’angoisse. Je sais gré auxhasards qui, contemplateur dérangé ...
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