Chronique de la quinzaine — 14 juillet 1842
Victor de Mars
Revue des Deux Mondes
4ème série, tome 31, 1842
Chronique de la quinzaine/1842/14 juillet 1842
La douleur et l’émotion nous ôtent tout courage, et c’est avec une profonde
répugnance que nous remplissons aujourd’hui notre tache accoutumée. Au moment
de prendre la plume, une affreuse nouvelle arrive jusqu’à nous. Depuis quelques
heures, un jeune prince, l’espoir de la nation, l’orgueil de sa famille, n’est plus. Un
malheur des plus cruels et des plus inattendus l’a ravi à la France, lorsque, plein de
force, d’activité, d’ardeur patriotique, de nobles pensées, il se préparait à la royauté
comme il appartenait à l’héritier de la monarchie de juillet, lorsque nos enfans
étaient assurés de jouir sous son règne des fruits de cette éducation forte, virile,
nationale, que le roi fait donner à tous les princes de sa maison.
Attente trompeuse ! Cette jeunesse dont il avait partagé dans l’école et dans les
camps les travaux et les récompenses, les périls et les palmes, cette jeunesse si
fière de la pensée qu’elle pourrait un jour saluer roi des Français ce camarade si
distingué, si aimable et si bon, cette jeunesse se réunira demain autour d’un
cercueil ; il ne lui faut plus songer aux acclamations d’un joyeux avènement : c’est au
chant funèbre qu’elle assistera, plongée dans un morne et douloureux silence.
Qui oserait retracer la douleur de la noble famille que le malheur a si cruellement
frappée ? Les grandes infortunes ...
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