Chronique de la quinzaine — 14 août 1841
Victor de Mars
Revue des Deux Mondes
4ème série, tome 27, 1841
Chronique de la quinzaine/1841/14 août 1841
Espartero n’a pas voulu laisser sans réponse la protestation de la reine Christine ; il
s’est empressé de lui opposer un manifeste d’une incroyable longueur. L’écrivain
du régent n’a pas été heureusement inspiré. Cette pièce que les hommes
politiques attendaient avec quelque impatience, n’est point la réponse dédaigneuse
et fière d’une révolution victorieuse ; c’est un factum prolixe, froit, déclamatoire, qui
ôte aux argumens plausible tout ce qu’ils avaient en eux-même de nerf et de portée.
Cette faiblesse est un fait remarquable. Il ne s’agit pas ici d’une question de forme :
il serait ridicule de s’arrêter au point de vue purement littéraire. Pour nous, cette
rédaction timide, énervée, n’osant pas serrer ses argumens et s’élancer fièrement
vers le but, révèle un fait politique. Elle trahit les ménagemens qu’Espartero se croit
obligé de garder, les incertitudes dont il est assailli, les craintes qui agitent son
esprit. Ce n’est pas ainsi que parle le chef d’une révolution agressive et populaire,
losque réellement il sent frémir sous sa main la puissance nationale, et que, se
tournant vers ses ennemis, il peut, sans être ridicule, prononcer le terrible quos ego.
Quel que soit alors le mérite littéraire de son langage, on y retrouve du moins le
courage et la fierté de sa position. Bref parce qu’il ne daigne pas discuter, ...
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