Alphonse AllaisDeux et deux font cinqBien que l’heure ne fût pas, à vrai dire, encore très avancée, une soif énormeétreignait les gorges du Captain Cap et de moi (triste conséquence, sans doute,des débauches de la veille.)D’un commun accord, nous eûmes vite défourché notre tandem, cependant quenotre regard explorait l’horizon.Précisément, un grand café très chic, ou d’aspect tel, se présenta.Malgré l’apparence fâcheusement heuropéenne (l’h est aspiré) de l’endroit, tout demême nous voulûmes bien boire là.— Envoyez-moi le stewart ! commanda Cap.— À votre disposition, monsieur ! s’inclina le gérant.— Donnez-nous deux grands verres.— Voilà, monsieur.— Je vous dis deux grands verres, et non point deux dés à coudre. Donnez-nousdeux grands verres.— Voilà, monsieur.— Enfin !… Du sucre, maintenant.— Voilà, monsieur.— Non, pas de ces burlesques morceaux de sucre… Du sucre en grain.— Voilà, monsieur.— Pas, non plus, de ce sucre de la Havane qui empoisonne le tabac.— Mais, monsieur…— J’exige du sucre en grain des Barbades. C’est le seul qui convienne aubreuvage que je vais accomplir.— Nous n’en avons pas d’autre que celui-là.— Triste ! Profondément triste ! Enfin…Et Cap jeta au fond de nos verres quelques cuillerées de sucre qu’il arrosa d’un peud’eau.— Et maintenant, deux citrons !— Voilà, monsieur.Cap jeta un regard de profond mépris sur les citrons apportés.— Deux autres citrons !— Voilà, monsieur.Ici, Cap entra dans une réelle fureur :— Je ...
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