Alphonse AllaisDeux et deux font cinq… Au restaurant de la gare, où je dîne avant de prendre le train, à la table tout prèsde moi se trouve un petit ménage d’amoureux, fraîchement conjoint, sans doute,extrêmement réjouissant.Surtout la petite femme, qui est drôle !— Oh ! regarde donc ce brave homme ! La bonne tête qu’il a ! Parle-lui, il doit êtrerigolo.Le brave homme ainsi désigné jouit effectivement d’une bonne tête. La facecramoisie avec, tout blancs, ses cheveux et ses favoris. Une tomate sur laquelle ilaurait neigé, comme disait je ne sais plus qui à propos de je ne sais plus quelautre. Sur sa tête, une casquette qui porte ce mot : Interprète.Docile, le jeune homme obéit à sa petite compagne :— Hé, monsieur ?— Monsieur ?— Vous êtes interprète ? — Oui, monsieur.— Est-ce que vous parlez français ?— Oui, monsieur.— Ah ! c’est bien regrettable, parce que, moi aussi, je parle français, de sorte quevous ne pourriez me rendre aucun service. C’est bien regrettable !— Qu’est-ce que vous voulez, monsieur, ce sera pour une autre fois.— Mais, que cela ne vous empêche pas de prendre un verre avec nous ; voulez-vous ?— Avec plaisir, monsieur.La petite femme semble heureuse comme tout de trinquer avec le vieil interprèterouge et blanc.… Le compartiment où je pénètre est occupé par trois messieurs, qui m’accueillentavec une évidente discourtoisie. Complet, s’écrient-ils, me désignant les placesvacantes encombrées par des couvertures et autres menus ...
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