Alphonse AllaisDeux et deux font cinq— Quant à moi, ajoutai-je, il y a bien longtemps, bien longtemps que je n’ai passé lepremier de l’An à Paris.— Vous regrettez de vous y trouver, cette année ?Un regard — mais quel regard ! — fut ma réponse.— Où étiez-vous l’année dernière ?— À Cannes.— Et l’autre année dernière ?— L’autre année dernière !… j’étais à Anvers ?— À Anvers !… Que faisiez-vous donc à Anvers ?— Ah ! voilà ! je ne saurais pas vous narrer cette histoire à la fois comiquefollement et sinistrement ridicule… D’ailleurs, à proprement parler, ce n’est pas àAnvers que j’ai passé le premier de l’An, mais à Bruxelles. Seulement, j’étais partide Paris à destination d’Anvers ; je vous raconterai ça un de ces jours.Ne faisons point poser davantage ma sympathique interlocutrice et disons-lui toutde suite ma pénible mésaventure.C’était le 30 décembre 1892.Il pouvait être dix heures.Je procédais aux premiers détails de ma toilette, quand un coup de sonnettedéchira l’air de mon vestibule.Ma femme de chambre était profondément endormie.Mon groom, complètement ivre, ronflait dans les bras de la cuisinière, très prise deboisson elle-même.Quant à mon cocher et mon valet de pied, j’avais perdu l’habitude de leurcommander quoi que ce fût, tant ils recevaient grossièrement la plus pâle de messuppliques.Je me décidai donc à ouvrir ma porte de mes propres mains.Le sonneur était un monsieur dont le rôle épisodique en cette histoire est tropmince pour que ...
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