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P I ERRE LO T I
JÉRUSALEM
BI BEBO O KP I ERRE LO T I
JÉRUSALEM
Un te xte du domaine public.
Une é dition libr e .
ISBN—978-2-8247-1093-8
BI BEBO OK
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Le te xte suivant est une œuv r e du domaine public é dité
sous la licence Cr e ativ es Commons BY -SA
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Cee œuv r e est publié e sous la licence CC-BY -SA, ce qui
signifie que v ous p ouv ez lég alement la copier , la r e
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encourag é à le fair e .
V ous de v ez aribuer l’ o euv r e aux différ ents auteur s, y
compris à Bib eb o ok. , à mes frèr es inconnus, je dé die ce liv r e — qui n’ est
que le jour nal d’un mois de ma vie , é crit dans un grand effortA de sincérité .
P I ERRE LO T I
n
1CHAP I T RE I
O cr ux, av e , sp es unica !
!. . . O ! ’ mourant de ce nom !. . . Comme il ray onne
encor e , du fond des temps et des p oussièr es, tellement que je meJ sens pr esque pr ofanateur , en osant le placer là , en tête du ré cit de
mon pèlerinag e sans foi !
Jér usalem ! Ceux qui ont p assé avant moi sur la ter r e en ont déjà é crit
bien des liv r es, pr ofonds ou magnifiques. Mais je v eux simplement
essay er de noter les asp e cts actuels de sa désolation et de ses r uines ; dir e
quel est, à notr e ép o que transitoir e , le degré d’ effacement de sa grande
ombr e sainte , qu’une g énération très pr o chaine ne v er ra même plus. . .
Peut-êtr e dirai-je aussi l’impr ession d’une âme — la mienne — qui fut
p ar mi les tour menté es de ce siè cle finissant. Mais d’autr es âmes sont p
ar eilles et p our r ont me suiv r e ; nous sommes quelques-uns de l’ang oisse
2Jér usalem Chapitr e I
sombr e d’à présent, quelques-uns d’au b ord du tr ou noir où tout doit
tomb er et p our rir , qui r eg ardons encor e , dans un inappré ciable lointain,
planer au-dessus de tout l’inadmissible des r eligions humaines, ce p ardon
que Jésus avait app orté , cee consolation et ce céleste r e v oir . . . Oh ! il n’y
a jamais eu que cela ; tout le r este , vide et né ant, non seulement chez les
pâles philosophes mo der nes, mais même dans les ar canes de l’Inde
millénair e , chez les Sag es illuminés et mer v eilleux des vieux âg es. . . Alor s,
de notr e abîme , continue de monter , v er s celui qui jadis s’app elait le
Rédempteur , une vague adoration désolé e . . .
V raiment, mon liv r e ne p our ra êtr e lu et supp orté que p ar ceux qui
se meur ent d’av oir p ossé dé et p erdu l’Esp érance Unique ; p ar ceux qui, à
jamais incr o yants comme moi, viendraient encor e au Saint-Sépulcr e av e c
un cœur plein de prièr e , des y eux pleins de lar mes, et qui, p our un p eu,
s’y traîneraient à deux g enoux. . .
n
3CHAP I T RE I I
Lundi, 26 mar s.
’ Pâques. Ar rivés du désert, nous nous é v eillons sous
des tentes, au milieu d’un cimetièr e de Gaza. P lus de Bé douinsC sauvag es autour de nous, plus de chame aux ni de dr omadair es.
Nos nouv e aux hommes, qui sont des Mar onites, se hâtent de seller et de
har nacher nos nouv elles bêtes, qui sont des che vaux et des mulets ; nous
le v ons le camp p our monter v er s Jér usalem.
Pré cé dés de deux g ardes d’honneur , que nous a donnés le p acha de
la ville et qui é cartent de vant nous la foule , nous trav er sons longuement
les mar chés et les bazar s. Ensuite , la banlieue , où l’animation du matin
se lo calise autour des fontaines : tout le p euple des v endeur s d’ e au est là ,
emplissant des outr es en p e au de mouton et les char g e ant sur des ânes.
Inter minables débris de murailles, de p ortes, amas de r uines sous des p
al4Jér usalem Chapitr e I I
mier s. Et enfin, le silence de la camp agne , les champs d’ or g es, les b ois
d’ olivier s sé culair es, le commencement de la r oute sablonneuse de Jér
usalem, où nos g ardes nous quient.
Nous laissons cee r oute sur notr e g auche , p our pr endr e , dans les
or g es v ertes, les simples sentier s qui mènent à Hébr on. Notr e ar rivé e dans
la ville sainte sera r etardé e de quarante-huit heur es p ar ce détour , mais
les pèlerins font ainsi d’habitude p our s’ar rêter au tomb e au d’ Abraham.
Envir on dix lieues de r oute aujourd’hui, dans les or g es de v elour s,
coup é es de régions d’aspho dèles où p aissent des tr oup e aux. D e loin en
loin, des camp ements arab es, tentes noir es sur le b e au v ert des herbag es.
Ou bien des villag es fellahs, maisonnees de ter r e grise ser ré es autour de
quelque p etit dôme blanchi à la chaux, qui est un saint tomb e au pr ote
cteur .
Sur le soir , le soleil, qui avait été très chaud, se v oile p eu à p eu de
br umes tristes, semble n’êtr e plus qu’un pâle disque blanc ; alor s, nous
pr enons conscience du chemin déjà p ar cour u v er s le nord.
En même temps, nous sortons des plaines d’ or g es, p our entr er dans
une contré e montagneuse , et bientôt la vallé e de Beït-Djibrin, où nous
comptons p asser la nuit, s’ ouv r e de vant nous.
V raie vallé e de la T er r e Pr omise , où « coulent le lait et le miel ». Elle
est v erte , d’un v ert délicieux de printemps, de prairie de mai, entr e ses
collines, que des olivier s vig our eux et sup erb es r e couv r ent d’un autr e v ert,
magnifiquement sombr e . On y mar che sur l’ép aisseur des herbag es, p ar mi
les anémones r oug es, les iris violets et les cy clamens r oses. Elle est r
emplie d’un p arfum de fleur s et, au centr e , mir oite un p etit lac, où b oiv ent à
cee heur e des moutons et des chè v r es.
Sur l’une des collines, est p osé le vieux p etit villag e arab e où l’ on
ramène p our la nuit des tr oup e aux innombrables ; tandis que l’ on dr esse
notr e camp , sur l’herb e haute et fleurie , c’ est de vant nous un défilé sans
fin de b œufs et de moutons, qui montent s’ enfer mer là , der rièr e des mur s
de ter r e , et que conduisent des b er g er s en longue r ob e et en turban, p
ar eils à des saints ou des pr ophètes ; des p etits enfants suiv ent, p ortant
av e c tendr esse des agne aux nouv e au-nés. Les der nièr es, v ont s’ eng
ouffr er entr e les étr oites r ues de b oue sé ché e , plusieur s centaines de chè v r es
noir es, qui cheminent en masse comp acte , comme une longue traîné e
in5Jér usalem Chapitr e I I
inter r ompue , d’une couleur et d’un luisant de corb e au ; c’ est inouï, ce que
ce hame au de Beït-Djibrin p eut contenir !. . . Et, au p assag e de toutes ces
bêtes, une saine o deur d’étable se mêle au p arfum de la tranquille
camp agne .
La vie p astorale d’autr efois est ici r etr ouvé e , la vie biblique , dans toute
sa simplicité et sa grandeur .
n
6CHAP I T RE I I I
Mardi, 27 mar s.
du matin, quand la nuit pèse de sa plus grande
ombr e sur ce p ay s d’arbr es et d’herbag es, de longs cris chan-V tants e xtrêmement plaintifs, e xtrêmement doux, p artent de
Beït-Djibrin, p assent au-dessus de nous, p our se rép andr e au loin dans
le sommeil et la fraîcheur des camp agnes : app el e x alté à la prièr e , r
emettant en mémoir e aux hommes leur né ant et leur mort. . . Les muézins, qui
sont des b er g er s, deb out sur leur s toits de ter r e , chantent tous ensemble ,
comme en canon et en fugue — et toujour s c’ est le nom d’ Allah, c’ est le
nom de Mahomet, sur pr enants et sombr es, ici, sur cee ter r e de la Bible
et du Christ. . .
Nous nous le v ons à l’heur e matinale où sortent les tr oup e aux p our
se rép andr e dans les prairies. La pluie , la bienfaisante pluie , inconnue
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