Impact d’une pédagogie de projet assistée par l’ordinateur en réseau sur les croyances motivationnelles et l’engagement au travail d’élèves du secondaire Frédéric Legault, PhD Professeur, Faculté d’éducation Université du Québec à Montréal Thérèse Laferrière, PhD Professeure, Faculté des sciences de l’éducation Université Laval Préparé pour : Le colloque du Programme pancanadien de recherche en éducation 2002 « La technologie de l’information et l’apprentissage » 30 avril – 2 mai 2002 Hôtel Crowne Plaza Montréal Centre Montréal (Québec) Les opinions exprimées dans ce document sont celles des auteurs et ne représentent pas celles du Conseil des statistiques canadiennes de l’éducationRÉSUMÉ Cette étude avait pour objectif principal d’examiner les répercussions de l’implantation d’une pédagogie de projet assistée par l’ordinateur en réseau dans des classes du secondaire (projet Protic) sur l’organisation pédagogique de la classe, les stratégies d'apprentissage adoptées par les élèves, la satisfaction de leurs besoins, le choix de leurs buts scolaires, leurs croyances motivationnelles et leur engagement. Pour cette étude, 182 élèves de troisième secondaire répartis dans six classes ont rempli des questionnaires portant sur les caractéristiques de leurs classes, sur leurs croyances motivationnelles et sur leurs démarches d’apprentissage en français et en mathématiques. Les six classes correspondaient à trois ...
Impact dune pédagogie de projet assistée par lordinateur en réseau sur les croyances motivationnelles et lengagement au travail délèves du secondaire Frédéric Legault, PhD Professeur, Faculté déducation Université du Québec à Montréal Thérèse Laferrière, PhD Professeure, Faculté des sciences de léducation Université Laval Préparé pour : Le colloque du Programme pancanadien de recherche en éducation 2002 « La technologie de linformation et lapprentissage » 30 avril 2 mai 2002 Hôtel Crowne Plaza Montréal Centre Montréal (Québec) Les opinions exprimées dans ce document sont celles des auteurs et ne représentent pas celles du Conseil des statistiques canadiennes de léducation
RÉSUMÉ
Cette étude avait pour objectif principal dexaminer les répercussions de limplantation dune pédagogie de projet assistée par lordinateur en réseau dans des classes du secondaire (projet Protic) sur lorganisation pédagogique de la classe, les stratégies d'apprentissage adoptées par les élèves, la satisfaction de leurs besoins, le choix de leurs buts scolaires, leurs croyances motivationnelles et leur engagement. Pour cette étude, 182 élèves de troisième secondaire répartis dans six classes ont rempli des questionnaires portant sur les caractéristiques de leurs classes, sur leurs croyances motivationnelles et sur leurs démarches dapprentissage en français et en mathématiques. Les six classes correspondaient à trois contextes différents, soit deux classes Protic, deux classes denrichissement et deux classes ordinaires. Tout dabord, nous avons comparé les perceptions des élèves des classes Protic avec celles des classes denrichissement et ordinaires en français et en mathématiques. Les résultats laissent entendre que le climat des classes Protic se distingue de celui des autres classes par la collaboration et linvestigation et, dans une moindre mesure, par linnovation et lindividualisation. Lesstratégies dapprentissage diffèrent principalement sur les plans de la construction de connaissances, du traitement en profondeur des contenus et, en classe de mathématiques, de lautorégulation. Dautre part, dans les classes Protic, les buts dévitement savèrent moins importants et les buts de maîtrise plus importants en classe de mathématiques. Ces mêmes élèves expriment plus de satisfaction quant à leurs besoins en classe de mathématiques, accordent plus de valeur au français et aux mathématiques et sengagent plus en classe de français. En ce qui concerne les relations entre les variables, lefficacité personnelle des élèves est reliée à la satisfaction des besoins dappartenance et de pouvoir et à ladoption de buts de maîtrise. La valeur accordée aux matières est liée positivement à lorganisation pédagogique de la classe, à ladoption de buts de maîtrise et négativement à ladoption de buts dévitement. Quant à lengagement, il est lié significativement aux stratégies adoptées par les élèves, dont principalement lautorégulation des apprentissages. Lensemble des résultats laisse entendre que les relations entre les processus denseignement et dapprentissage sont semblables dun contexte à lautre, mais que les niveaux de réalisation sont plus élevés dans les classes caractérisées par la pédagogie de projet assistée par lordinateur en réseau.
La réussite pour tous sans abaisser les niveaux d'exigence est un objectif important pour les responsables de léducation des pays occidentaux. Toutefois, même si le développement des adolescents nest pas toujours aussi problématique quil est souvent perçu, plusieurs jeunes éprouvent des difficultés durant cette période. Ainsi, au Québec, le taux de décrochage scolaire, qui en 1999 était de 10,4 % chez les jeunes âgés de 17 ans (MEQ, 2001), demeure préoccupant et constitue de ce fait un problème scolaire majeur. De façon plus générale, dans la plupart des pays occidentaux, on assiste à une diminution de la motivation des élèves lorsquils atteignent le secondaire (Carnegie Council on Adolescent development, 1988; Conseil supérieur de léducation, 1995). Ainsi,peu après lentrée au secondaire, on constate une détérioration de lintérêt pour lécole, de la motivation intrinsèque (Ames, 1992), de lestime de soi (Harter, Whitesell et Kowalski, 1992), du sentiment defficacité personnelle et des croyances motivationnelles (Anderman, Maehr et Midgley, 1999), couplées à un accroissement de lanxiété et de limpuissance apprise (Eccles et Midgley, 1989). Certains chercheurs (Eccles, Midgley, Wigfield, Buchanan, Reuman, Flanagan et Mac Iver, 1993) posent lhypothèse dun mauvais arrimage entre les besoins des adolescents en développement et lenvironnement dapprentissage que leur offrent la plupart des écoles secondaires. Selon Eccles et al. (1993), lorganisation scolaire du secondaire peut se caractériser par six patrons de fonctionnement qui seraient responsables de cet état de fait. Tout dabord, au premier cycle du secondaire, les enseignants exercent plus de contrôle sur leurs élèves et leur laissent peu de possibilités de prendre des décisions concernant leurs apprentissages. À cela sajoute le fait que les relations entre les enseignants et leurs élèves savèrent moins personnelles et moins chaleureuses et que la confiance entre les deux parties diminue. De plus, le passage au secondaire est associé à une augmentation des approches pédagogiques plus impersonnelles, comme lenseignement magistral en grand groupe, à une diminution du travail déquipe et à une disparition quasi complète des approches individualisées. Ensuite, les enseignants du secondaire se distinguent de ceux du primaire en ce quils se préoccupent moins des élèves en difficultés et quils se considèrent moins compétents pour travailler avec ces élèves. Eccles et al. (1993) affirment aussi que le travail scolaire qui est proposé aux élèves de la première année du secondaire semble requérir des habiletés cognitives de moins haut niveau que ce qui se fait à la fin du primaire. Ce constat heurte quelque peu nos conceptions à légard de lenseignement qui est sensé être organisé efficacement par des spécialistes de la matière, mais des études observationnelles montrent quune très faible proportion des activités scolaires met en branle des habiletés de création ou dexpression et que la prise de notes est très répandue. Enfin, lévaluation des apprentissages est plus stricte au secondaire et elle suscite plus de phénomènes de comparaison sociale, ce qui affecte à la baisse la confiance en soi de plusieurs élèves. En résumé, la théorie de Eccles et al. (1993) laisse entendre que les difficultés de lécole secondaire à répondre aux besoins dautonomie et de contrôle des adolescents ont pour résultat une diminution de leur motivation intrinsèque et de leur intérêt pour lécole. Cest en partie pour répondre à ces problèmes que de nombreux spécialistes privilégient des approches pédagogiques qui favorisent une plus grande participation des élèves. De ces approches sont issues des stratégies comme la pédagogie de projet assistée par lordinateur, qui est considérée comme un moyen de permettre aux élèves de vivre des situations dapprentissage signifiantes et complexes (Lin et Hsieh, 2001). Quand laccent est mis sur
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lapprentissage, les enseignants doivent progressivement prendre conscience de la nécessité de modifier leurs façons de faire et leurs conceptions de lapprentissage de leurs élèves. Selon ce qui ressort de l'évaluation de plusieurs expérimentations pédagogiques utilisant les TIC, les nouvelles technologies offrent d'indéniables possibilités pour stimuler les processus d'apprentissage, ancrer ceux-ci dans un corpus de connaissances particulièrement large et riche et accroître la maîtrise des apprentissages eux-mêmes (Grégoire, Bracewell et Laferrière, 1996). Les chercheurs du projet Apple Classrooms of Tomorow (Fisher, Dwyer et Yocam, 1996), lequel consistait à équiper complètement des classes sélectionnées au travers les Etats-Unis, ont rapporté des résultats sur les plans de lécriture, des mathématiques, et des habiletés de résolution de problème qui se sont avérés supérieurs dans les classes ACOT que dans les classes ordinaires. Par contre, dautres études laissent entendre que laccès à de léquipement informatique ne garantit pas à lui seul son utilisation régulière par les enseignants et les élèves. Ainsi, Newhouse et Rennie (2001) rapportent que même lorsque de nombreux ordinateurs sont mis à la disposition des élèves, cela ne suffit pas toujours pour quune utilisation fréquente et efficace soit la règle. Cuban, Kirkpatrick et Peck (2001) offrent deux explications pour cela. Tout dabord, il faut se rendre compte que toute révolution technologique prend un certain temps avant de se diffuser au sein de la population en général. Une deuxième explication porte sur le contexte des écoles secondaires qui ne favorise pas beaucoup les nouvelles pratiques. La présente étude vise à vérifier si limplantation de la pédagogie de projet assistée par des ordinateurs portables dans des classes du secondaire est réellement associée à une organisation pédagogique qui se distingue de celle des autres classes et qui réponde mieux aux besoins des élèves. Elle cherche aussi à vérifier si cette nouvelle organisation est susceptible d'amener les élèves à développer des stratégies d'apprentissage efficaces, comme la construction de connaissances et le traitement en profondeur des idées et à délaisser les stratégies inefficaces comme l'évitement du travail. Enfin, elle examine si les élèves de ces classes adopteront en plus grand nombre des buts de maîtrise et sengageront plus dans leurs études. Lapproche par projet La pédagogie de projet a une longue histoire, mais cest au tournant du siècle dernier que lon a commencé à expérimenter et à théoriser des pratiques relevant de la pédagogie du projet. Pour Dewey, lindividu apprend mieux en faisant quen écoutant. Cest en construisant des projets, en faisant des expériences avec des partenaires quon apprend. De nombreux pédagogues européens et américains, comme Freinet, Makarenko, Piaget, puis Brown, Pea et Barron y ont apporté diverses contributions. La pédagogie de projet recouvre une multitude de pratiques, mais pour isoler les principales caractéristiques de cette approche, nous emprunterons les mots de Huber (1999) : On appellera donc « projet » :une action se concrétisant dans la fabrication dun produit socialisable valorisant, qui en même temps quelle transforme le milieu, transforme aussi lidentité de ses auteurs en produisant des compétences nouvelles à travers la résolution des problèmes rencontrés. (p. 43).
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Le travail en projet implique normalement trois phases, soit la préparation, lexécution et lexploitation. Chacune de ces phases comprend deux ou trois activités majeures (Grégoire et Laferrière, 2001). La phase de préparation comprend le choix dun projet, le repérage des ressources requises et lorganisation du travail. Cette phase suscite la curiosité, lintérêt et le questionnement des élèves et elle favorise leur progression dans le développement des compétences méthodologiques et sociales. La deuxième phase se caractérise par lélaboration du projet à lintérieur des équipes et par la coordination et la synthèse des contributions individuelles. Lutilisation de nouvelles technologies permet davoir accès à des données à jour sur des problèmes concrets. Les habiletés de planification, de conceptualisation, danalyse et de synthèse sont sollicitées régulièrement. À ces habiletés sajoutent celles relatives à lorganisation du travail en équipes et à la collaboration. La discussion entre pairs peut remplir plusieurs fonctions dans le processus de construction de connaissances. Selon Driver (1995), elle procure un espace dans lequel des idées au départ implicites deviennent explicites, sont étudiées et sont mises à la disposition des autres pour la réflexion. Pour cela, les participants clarifient leurs propres conceptions afin de les soumettre et construisent leurs propres schèmes à partir des idées des autres. Enfin, la phase dexploitation pédagogique consiste à faire un retour sur lensemble du projet et à lui donner des suites. Cest à ce moment que les élèves intègrent différentes disciplines et quils sont amenés à reconnaître et à nommer les stratégies efficaces. Les projets permettent aux élèves de vivre des situations complexes et signifiantes, de prendre conscience de leurs façons de travailler et de mobiliser des stratégies cognitives qui permettent le traitement en profondeur des problèmes. Pour cela, lenseignant doit accepter que son rôle devienne plus celui dun médiateur pédagogique qui accompagne et guide les élèves tout au long du projet, qui crée un climat propice, qui suscite la coopération et qui aide lélève à traiter linformation et à utiliser les technologies de linformation (Arpin et Capra, 2001). Quant à lélève, il sinvestit volontairement dans le projet, il participe activement à la construction de ses apprentissages et il mobilise différentes stratégies cognitives et métacognitives. Lorganisation pédagogique de la classe et le climat dapprentissage En milieu scolaire, il s'avère quun ensemble de variables contextuelles, quon désigne habituellement par lexpression climat dapprentissage (Michaud, Comeau et Goupil, 1990), ait des répercussions sur lapprentissage des élèves. Selon Moos (cité par Fraser, 1986), le climat d'apprentissage est composé des trois grandes dimensions suivantes, soit les relations interpersonnelles, le développement personnel et la gestion du système. Des recherches, comme celle de Walberg (1969), font ressortir que le climat dans lequel se déroule lapprentissage a un effet important sur la performance scolaire des élèves. Selon Deci et Ryan (1987), lorsque les conditions sont favorables à la motivation intrinsèque, elles conduisent vers un meilleur apprentissage. Il semble que le climat d'apprentissage puisse effectivement influencer la motivation des élèves à partir de trois facteurs: lorganisation régissant les relations entre les élèves, le style denseignement de lenseignant et la tâche. En ce qui concerne le premier facteur, les relations entre les élèves peuvent être de nature compétitive, coopérative ou individualiste. Une
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structure de classe qui favorise lautodétermination permet aux élèves de se sentir plus compétents (Vallerand et Thill, 1993) et un enseignant qui encourage lautonomie de ses élèves suscite chez eux un sentiment de compétence et dautodétermination et soutient leur motivation intrinsèque. Dautre part, la façon dont lenseignant est perçu par ses élèves influence leur motivation. Celui qui a loccasion de nouer des relations plus personnelles avec ses élèves a plus de chances de susciter leur intérêt et leur engagement. Enfin, la perception que lélève a de lutilité de lactivité influence aussi sa motivation scolaire. Lélève qui saisit limportance des tâches à accomplir et comprend les raisons de les accomplir aura le goût de sengager et de persévérer dans les tâches scolaires. Nous croyons que lorganisation pédagogique de contextes qui encouragent lapprentissage par projet assisté par lordinateur en réseau devrait être caractérisé par linnovation, par la collaboration, par la recherche et par lindividualisation de lenseignement. Ces caractéristiques devraient contribuer à satisfaire les besoins des élèves, être liées à ladoption de stratégies dapprentissage de haut niveau et de buts scolaires axés sur lapprentissage. Les buts scolaires et les stratégies dapprentissage des élèves Plusieurs recherches (Ames, 1992; Roeser, Arbreton et Anderman, 1993) montrent que les pratiques pédagogiques que lenseignant adopte sont reliées à différentes orientations motivationnelles et stratégies dapprentissage des élèves. Une étude observationnelle de Meece (1991) laisse entendre que les enseignants dont les élèves privilégiaient des buts de maîtrise avaient tendance à promouvoir des apprentissages significatifs, à adapter leur enseignement aux besoins particuliers de leurs élèves et à favoriser lautonomie et la collaboration. Les buts de maîtrise sont poursuivis par lélève qui désire accomplir une activité, un projet pour sapproprier des connaissances, pour lapprentissage quil procure en soi (Dweck, 1986; Hidi & Harackiewicz, 2000). À ces buts sont associés une plus grande persistance face aux difficultés et même à léchec, une reconnaissance de limportance de leffort et lacceptation de certains risques. En effet, ces élèves ont tendance à considérer les échecs comme une étape normale du processus dapprentissage (Boileau, Bouffard et Vezeau, 2000). Pintrich et Schrauben (1992) ont examiné la nature des buts dapprentissage chez des cohortes délèves du secondaire et détudiants universitaires pour conclure que les élèves qui poursuivent des buts de maîtrise ont davantage tendance à sengager cognitivement dans des activités dauto-régulation des apprentissages et utilisent des stratégies cognitives et métacognitives, comme la planification et lévaluation de leur démarche dapprentissage. De leur côté, les buts de performance sont plutôt associés à la recherche dune évaluation positive de ses habiletés, à lévitement des jugements négatifs, au désir de surpasser les autres, et à limportance accordée aux compétences au détriment de leffort (Hidi & Harackiewicz, 2000). Selon Pintrich (1989), les élèves qui poursuivent des buts de performance aiment relever des défis et préférent utiliser des stratégies dapprentissage qui demandent le minimum defforts. Cependant, les buts de performance ne revêtent pas un caractère seulement négatif. Bouffard, Boivert, Vezeau et Larouche (1995), ainsi que Archer (1994), reconnaissent les forces suivantes aux élèves les adoptant, à la condition quils possèdent préalablement un haut niveau de perception de leur compétence : lengagement cognitif, lutilisation de stratégies
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adaptatives dapprentissage, ainsi que la performance scolaire. Par contre, les erreurs et les difficultés éprouvées sont perçues négativement parce quelles sont considérées comme des indices évidents dun manque de compétence (Boileau, Bouffard, Vezeau, 2000). Les buts dévitement constituent le type de buts le moins documenté dans la théorie des buts. Cette modalité a été ajoutée à son répertoire pour distinguer les élèves qui poursuivent des buts de performance de ceux qui poursuivent des buts dans loptique de ne faire que le minimum afin déviter les échecs (Bouffard et al., 1999). Les buts dévitement se traduisent en classe par des stratégies visant à ralentir le travail du groupe et à abaisser les exigences. De ce point de vue, certains chercheurs ont révisé le modèle binaire original de la théorie des buts (Dweck, 1986; Nicholls, 1984) pour y ajouter cette troisième catégorie. Dailleurs, plusieurs analyses factorielles ont validé lindépendance des trois types de construits (Laguardia & Ryan, 2000). Les besoins des élèves Des pédagogues et des chercheurs (Marks, 2000; Glasser, 1986) considèrent que beaucoup délèves dans les écoles se contentent de faire un travail de qualité médiocre et que même, dans de nombreux cas, ils ne font pas de travail du tout. Glasser estime que pas plus de la moitié des élèves du secondaire sont prêts à faire un effort pour apprendre et que cette situation montre les limites des structures scolaires traditionnelles. Une solution proposée est que les enseignants interviennent plus activement de manière à combler les besoins fondamentaux de leurs élèves. Ceux-ci peuvent être conceptualisés comme des besoins de survie, dappartenance, de pouvoir, de liberté et de plaisir. Charles (1996) présente ainsi les idées de Glasser sur les interventions à faire pour combler les besoins des élèves. Les élèves acquièrent le sentiment dappartenance lorsquon les invite à participer aux activités de la classe, quils reçoivent de lattention de la part des enseignants et quils ont la possibilité de questions concernant la classe. Ils ont le sentiment davoir du pouvoir lorsque lenseignant leur demande de décider avec lui quels sujets seront étudiés en classe et quelle méthode de travail sera adoptée. Les élèves éprouvent du plaisir lorsquon leur permet de travailler ensemble, de discuter, de participer à des activités intéressantes et de faire part de leurs réalisations à leurs camarades. Ils éprouvent un sentiment de liberté lorsquon leur permet de faire des choix responsables (p. 183). Pour Glasser (1986), les activités scolaires doivent contribuer à la satisfaction des besoins fondamentaux des élèves. Ilpropose que les enseignants délaissent les pratiques denseignement traditionnelles et quils exigent un travail de qualité de lélève. Lui laisser plus de place dans le choix des sujets, favoriser des retours sur les apprentissages, créer dans la classe un climat chaleureux, lui demander de ne faire que du travail utile sont des suggestions faites par Glasser qui pourraient très bien sappliquer à ce qui est préconisé dans les classes Protic.
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La classe Protic Le programme Protic est une initiative de lécole les-Compagnons-de-Cartier et de la commission scolaire des Découvreurs (Commission scolaire des Découvreurs, 1997). Le compte rendu de la première phase du projet (Laferrière et al., 2000) rapporte que les concepteurs de Protic sont animés par la conviction quil faut rompre avec la pédagogie traditionnelle, et () orientent leur réflexion autour de deux grands paramètres : premièrement, les TIC doivent être parfaitement intégrés au projet pédagogique si lon désire en faire un outil de travail au même titre quun volume ou une grammaire; deuxièmement, pour en arriver à cette parfaite intégration, il faut développer une approche qui exploite les nouvelles tendances pédagogiques, soit lapprentissage par projet, la coopération entre les élèves et le développement des compétences transversales. (p. 10). Le projet Protic (Giguère, Grégoire et Bergeron, 1997) recrute 64 élèves qui entrent en première année du secondaire (deux groupes classes) et qui sont désireux dentreprendre une démarche active dapprentissage sétendant tout au long du secondaire. À chaque année, une nouvelle cohorte sajoute, ce qui élève le nombre délèves à 192 durant lannée scolaire 1999-2000. Lesenseignants sont recrutés sur la foi de leur intérêt à travailler par projet et de leur désir dintégrer les TIC à leur pédagogie. Leurs modèles pédagogiques ont en commun le développement de lautonomie, du sens des responsabilités et de la coopération de leurs élèves. Chacun est responsable dune matière de base jumelée à une matière secondaire et agit comme titulaire dune classe, tout en intervenant de façon régulière dans la deuxième classe du même degré. Cette distribution des tâches permet de doubler les occasions déchanges enseignant-élèves. Lorganisation humaine et matérielle est mise au service du projet (Grégoire, 1997) et le personnel des services éducatifs de la Commission scolaire accompagne très activement les enseignants dans leur démarche. Des enseignants en formation initiale viennent apporter leur contribution à loccasion de leurs stages pratiques. Dans la classe Protic, chacun des membres de la communauté dispose dun ordinateur portable branché en réseau, à lécole comme à la maison (Laferrière et al., 2000), mais ce nest pas lordinateur et ce qui laccompagne qui sont le principal objet détudes. Lintégration de lordinateur à la classe na de sens que dans le cadre dun apprentissage actif. Ce nest pas, en effet, par linteraction personne/machine que le programme Protic se distingue, mais par linteraction entre personnes qui disposent dordinateurs en réseau pour faire (ou faire faire) lapprentissage de contenus du programme. (p. 17). Lemploi des ordinateurs sert donc à la réalisation de projets dapprentissage qui peuvent inclure plus dune matière. En fait, la pédagogie de projet crée un contexte favorable à lintégration de lordinateur lorsque ce dernier est utilisé comme outil qui multiplie les possibilités déchange et de traitement de linformation. Le rôle de lenseignant des classes Protic nécessite alors de mettre en place les conditions propices à la création dune véritable communauté apprenante permettant le développement progressif de lautonomie intellectuelle
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de ses membres. Lélève doit, de son côté, participer au choix, à la conception et à la réalisation des activités. Il a son mot à dire dans la division des tâches et il a la responsabilité de la partie de travail qui lui est attribuée (Laferrière et al., 2000). À chaque année, une nouvelle équipe denseignants qui sengage à développer cette approche anime la communauté des élèves. Le groupe délèves qui fait lobjet de notre étude en est à sa troisième année de fonctionnement dans ce cadre. Objectifs de la recherche 1- Examiner ce qui distingue les classes Protic des autres classes sur les plans suivants : organisation pédagogique de la classe, stratégies d'apprentissage adoptées par les élèves, degré de satisfaction des besoins des élèves, buts scolaires et croyances motivationnelles et engagement.2- Examiner les relations entre lorganisation de la classe et les variables liées au processus denseignement-apprentissage, telles que les stratégies d'apprentissage, la satisfaction des besoins et les buts scolaires des élèves. 3- Examiner jusquà quel point les variables liées à lorganisation de la classe, les stratégies d'apprentissage, la satisfaction des besoins et les buts scolaires des élèves peuvent prédire les croyances motivationnelles et lengagement. Méthode 1. Participants Six classes de troisième secondaire, comprenant 182 élèves. De ce nombre, 53 sont inscrits dans deux classes Protic, 50 dans deux classes d'enrichissement (programme déducation internationale) et 79 dans quatre classes ordinaires (deux en français et deux en mathématiques). Comme les élèves des classes ordinaires ne sont pas les mêmes dans les classes de français et de mathématiques, léchantillon comprend 143 élèves en français et 142 élèves en mathématiques. L'âge moyen des élèves était de 15,1 ans au moment de la cueillette de données. Les élèves des deux classes ordinaires étaient légèrement plus âgés que ceux des classes Protic et des classes d'enrichissement (15,4 ans pour les premiers contre 15,0 pour les autres). 2. Mesures Les échelles suivantes décrivent l'organisation pédagogique de la classe, les stratégies d'apprentissage, les croyances motivationnelles et l'engagement des élèves. Elles ont été soumises aux élèves à deux reprises, une première fois pour la classe de français et une deuxième fois pour les mathématiques. 2.1 Organisation pédagogique de la classe Quatre échelles sont retenues: - Apprentissage en collaboration (5 items, alpha=0,80). Cette échelle permet d'estimer dans quelle mesure les activités de la classe encouragent les échanges entre les élèves et favorisent l'apprentissage en collaboration.
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- Investigation (4 items, alpha=0,78). Inspirée de l'échelle de Fraser (1990), elle mesure à quel point ce sont les élèves qui font des recherches pour vérifier leurs idées et pour trouver des réponses à leurs questions. - Innovation (4 items, alpha=0,60). Traductionde l'échelle développée par Moos et Trickett (1974), elle mesure les perceptions des élèves au regard de l'innovation pédagogique, tout particulièrement le rôle actif qui est dévolu aux élèves. - Individualisation (5 items, alpha=0,77). Traduite et adaptée de l'échelle de Fraser (1990), elle indique à quel point les élèves ont la possibilité de s'entretenir avec leur enseignant, de même que le degré auquel l'enseignant se préoccupe de leur bien-être et de leur développement social. 2.2 Stratégies d'apprentissage des élèves Trois échelles : - Traitement en profondeur (9 items, alpha=0,78). Cette échelle, traduction de celle de Roeser, Arbreton et Anderman (1993), indique dans quelle mesure les élèves adoptent des stratégies cognitives efficaces telles que la planification, l'étude systématique et la recherche de liens significatifs. - Construction de connaissances (5 items, alpha=0,83). Tirée de l'échelle SPOCK développée par Shell et al. (1995), elle mesure des stratégies comme l'établissement de liens entre les idées, les faits et les disciplines. -Autorégulation des apprentissages (5 items, alpha = 0,72). Cette échelle provient aussi de l'instrument de Shell et al.; elle mesure à quel point l'élève organise ses apprentissages et active des processus cognitifs et métacognitifs dans ses démarches. 2.3 Buts scolaires Les trois échelles suivantes sont inspirées de Roeser, Arbreton et Anderman (1993). - Buts de maîtrise (6 items; alpha=0,84). Il sagit de buts axés sur lapprentissage, sur la maîtrise des contenus à létude. - Buts de performance (4 items; alpha=.64). Il sagit de buts motivés par le désir de surpasser les autres. - Buts dévitementl (3 items, alpha=0,60). Cetteéchelle évalue le recours à des stratégies d'évitement lorsque l'élève fait face à des difficultés. 2.4 Besoins personnels Quatre échelles ont été construites à partir des descriptions fournies par Glasser (1986). - Appartenance (2 items; alpha=0,50). - Liberté (3 items; alpha=0,45). - Pouvoir (2 items; alpha=0,72). - Plaisir (3 items; alpha=0,75). 2.5 Croyances motivationnelles Deux échelles : - Sentiment d'efficacité personnelle (6 items, alpha=0,78). Cette échelle est tirée d'un questionnaire élaboré par Midgley et Maehr (1990) et elle évalue le sentiment de compétence de l'élève. - Valeur intrinsèque (9 items, alpha=0,86). Cette échelle est une traduction d'une échelle élaborée par Pintrich et De Groot (1990) et qui mesure l'intérêt de l'élève pour la matière.
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2.6 Engagement -L'échelle d'engagement (4items, alpha=0,77), adaptée de Moos et Trickett (1974), décrit la quantité d'attention et d'énergie mises dans les travaux. Résultats Les analyses sont structurées en fonction des trois objectifs de la recherche. 1. Différences entre les classes Protic et les autres classes Les analyses portent sur ce qui distingue les classes Protic des autres classes, ordinaires et enrichies. Nous présumons que dans les premières, en plus d'une utilisation intensive des TIC, sont privilégiées une pédagogie de projet, ainsi que l'apprentissage en collaboration. Il na pas été possible de recourir à des analyses de variance avec mesures répétées, étant donné que les groupes contrôles nétaient pas les mêmes en français et en mathématiques. Cest pourquoi, les tests sont exécutés séparément pour chaque matière. En ce qui concerne lorganisation pédagogique de la classe, six des huit analyses de variance donnent des résultats significatifs. Tout d'abord, en français, les contextes se distinguent selon le niveau de recherche (F 2,140 = 15,46, p<.001) et le niveau de collaboration entre les élèves (F 2,140 = 9,27, p<.001). Des analyses supplémentaires (tests de Tukey), montrent que les élèves font plus de recherches dans les classes Protic que dans les deux autres contextes et qu'ils collaborent plus que dans les classes ordinaires. En ce qui concerne les mathématiques, les contextes se distinguent sur le plan de l'investigation (F 2,139 = 41,63, p<.001), de l'innovation (F 2,139 = 22,30, p<.001), de lindividualisation (F 2,139 = 36,98, p<.001) et de la collaboration perçues (F 2,139 = 36,94, p<.001). Dans les quatre cas, les tests de Tukey montrent que les moyennes sont plus fortes dans les classes Protic que dans les deux autres contextes. Les analyses suivantes montrent que les stratégies d'apprentissage adoptées par les élèves des trois contextes diffèrent de manière significative pour la majorité des indicateurs. Pour les classes de français, les différences majeures concernent la construction de connaissances (F 2,140 = 4,53, p<.05) et, de façon plus marginale, le traitement en profondeur (F 2,140 = 2,90, p<.06). Dans les classes de mathématiques, les différences touchent la construction de connaissances (F 2,139 = 16,70, p<.001), le traitement en profondeur (F 2,139 = 11,46, p<.001) et lautorégulation (F 2,139 = 3,87, p<.05). Les analyses post-hoc (tests de Tukey) montrent que, pour la construction de connaissance et le traitement en profondeur, ce sont les élèves des classes Protic qui ont des moyennes plus fortes. En ce qui concerne lautorégulation des apprentissages, les classes Protic surpassent les classes ordinaires. Les analyses portant sur les buts scolaires sont assez convaincantes elles aussi. Dans les classes de français, ce sont les buts d'évitement (F 2,140 = 7,64, p<.001) et les buts de performance (F 2,140 = 3,29, p<.05) qui distinguent les contextes. Dans le premier cas, les tests de Tukey font ressortir des différences entre les classes Protic et les deux autres contextes. Dans le second cas, des différences significatives ressortent entre les classes Protic et les