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Alg`ebre bilin´eaire et analyse de Fourier
cours r´edig´e par Jean-Pierre Demailly
Universit´e Joseph Fourier, Grenoble
Module MAT244, Ann´ee universitaire 2011/2012
`Table des matieres
0. Motivations 2
1. Rappels et compl´ements d’alg`ebre lin´eaire 3
2. Formes bilin´eaires. 12
3. Orthogonalit´e par rapport a` une forme bilin´eaire sym´etrique 23
4. Formes sesquilin´eaires 34
5. Normes et distances, m´ethode des moindres carr´es 44
6. Endomorphismes sym´etriques, anti-sym´etriques, orthogonaux et unitaires 49
7. Coniques et quadriques 58
8. Un bref aperc¸u de la vie de Fourier 69
9. L’´equation de la chaleur 70
10. S´eries de Fourier, introduction 74
11. Notions de base sur les s´eries num´eriques et les s´eries de fonctions 79
12. S´eries de Fourier, th´eor`emes fondamentaux de convergence 85
Dans tout le cours,K d´esignera un corps commutatif tel queQ,R ouC (dans toutes les
parties purement alg´ebriques cela pourrait ˆetre aussi un corps commutatif quelconque dans
lequel 2 = 1+1 = 0, mais nous n’aurons pas besoin ici de consid´erer ce cas plus g´en´eral).
1
62
0. Motivations
Supposons que nous soyons amen´es a` nous promener en montagne, en nous rep´erant `a partir
d’une carte d’´etat-major.
On effectue un petit d´eplacement depuis le point (x,y) jusqu’au point (x+dx,y +dy) en
supposant (dx,dy) suffisamment petit pour que la pente du terrain n’ait pas le temps de
changer sensiblement (ce n’est pas n´ecessairement le cas sur notre dessin, mais la fl`eche
n’aurait pas ´et´e visible!) Le probl`eme est de calculer la distance parcourue.
p
2 2Sur la carte, le d´eplacement effectu´e est dx +dy d’apr`es le th´eor`eme de Pythagore, mais
ceci ne tient absolument pas compte du fait que l’on se d´eplace sur un terrain en pente. En
r´ealit´e, l’altitude z varie comme une fonction z =f(x,y) du point (x,y) rep´er´e sur la carte,
et la longueur du d´eplacement effectu´e est donc
p
2 2 2ds = dx +dy +dz ,
du moins si on suppose que l’on s’est d´eplac´e en ligne droite (sur une distance suffisamment
faible, on peut consid´erer que c’est le cas). Par diff´erentiation, on a
′ ′dz =f dx+f dyx y
′ ′ou` f , f sont les d´eriv´ees partielles au point (x,y). On trouve doncx y
2 2 2 ′ ′ 2 ′2 2 ′2 2 ′ ′ds =dx +dy +(f dx+f dy) = (1+f )dx +(1+f )dy +2f f dxdy.x y x y x y
Si (u,v) = (dx,dy) est le vecteur d´eplacement, on voit que la distance parcourue s’exprimep
comme q(u,v) ou` q(u,v) est une expression de la forme
2 2q(u,v)=au +bv +cuv.
C’est cequ’onappelle une forme quadratiquede2variables. Plusg´en´eralement, onest amen´e
`a consid´erer des espaces de dimension plus grande, par exemple en Physique on introduit
l’espace-temps de dimension 4, avec ses coordonn´ees (x,y,z,t) ou` t est le temps. Dans ce
cas, une forme quadratique jouant un rˆole important en th´eorie de la relativit´e restreinte est
la forme quadratique de Lorentz
2 2 2 2 2q(dx,dy,dz,dt)=dx +dy +dz −c dt3
ou` c est la vitesse de la lumi`ere. La th´eorie de la relativit´e g´en´eralis´ee consiste en l’´etude
de l’espace-temps courb´e par la pr´esence de la mati`ere ; dans ce cas, de mˆeme que dans
2 2l’expression de ds pour un parcours vallonn´e en montagne, on peut avoir des termes dx ,
2dxdy,... , dxdt, ... , dt dont les coefficients d´ependent eux-mˆemes de (x,y,z,t)!
L’un des buts de ce cours est une ´etude syst´ematique des formes quadratiques et de leurs
propri´et´es. Cette ´etude est fortement li´ee a` celle des applications et formes lin´eaires, c’est
pourquoi nous commencerons par des rappels g´en´eraux d’alg`ebre lin´eaire.
´ ` ´1. Rappels et complements d’algebre lineaire
UnK-espace vectoriel est un ensemble E muni d’une loi de composition interne not´ee +
E×E →E, (x,y)7!x+y,
et d’une loi de composition externe not´ee· (le· ´etant d’ailleurs tr`es souvent omis)
K×E →E, (λ,x)7!λ·x,
appel´ee ici multiplication par un scalaire, satisfaisant aux propri´et´es suivantes :
(1) (associativit´e de +) x+(y+z) = (x+y)+z pour tous x,y∈E
(2) (commutativit´e de +) x+y =y+x pour tous x,y∈E
(3) (´el´ement neutre) ilexiste un´el´ement 0 tel que 0 +x =x+0 =x pourtoutx∈E.E E E
′ ′ ′(4) pour toutx∈E, il existe un´el´ementx ∈E tel quex+x =x +x = 0 (cet´el´ementE
′x est alors unique, appel´e oppos´e de x, et il est not´e−x)
(5) 1·x =x pour tout x∈E
(6) (λµ)·x =λ·(µ·x) pour tous λ,µ∈K, x∈E
(7) λ·(x+y) =λ·x+λ·y pour tous x,y∈E, λ∈K
(8) (λ+µ)·x =λ·x+µ·x pour tous x∈E, λ,µ∈K.
nExemples 1.1. l’ensembleK des n-uplets (x ,...,x ) d’´el´ements deK ; l’ensembleK[X]1 n
des polynoˆmes a` coefficients dans K ; l’ensemble M (K) des matrices carr´ees d’ordre n ;n
0l’ensemble C (I,K) des fonctions continues f : I → K ; l’ensemble des suites r´eelles ou
complexes.
Unsous-espace vectorielF deE estunsous-ensemble deE non vide,stable paraddition
etmultiplicationparunscalaire:∀x,y∈F onax+y∈F,et∀λ∈K,∀x∈F,onaλ·x∈F.
De fa¸con ´equivalente, c’est un sous-ensemble de E non vide et stable par combinaisons
lin´eaires : ∀λ,µ ∈K et ∀x,y ∈ F on λ·x +µ·y ∈ K. Dans ce cas, F est lui mˆeme un
K-espace vectoriel pour les lois + et· induites par E.
Remarque 1.2. Un sous-espace vectoriel F de E contient toujours 0 , car si x∈F, alorsE
0·x = 0 ∈F.E
Exemple 1.3. Un plan d’´equationax+by+cz = 0 (a,b,c∈R) est un sous-espace vectoriel
3deR .
Contre-exemple1.4. L’ensemble d´efiniparx−y+2z = 3n’estpasunsous-espacevectoriel
3deR .
Si F , F , ..., F sont des sous-espaces vectoriels de E, alors l’intersection1 2 N
N\
F =F ∩...∩Fi 1 N
i=14
est un sous-espace vectoriel de E, mais en g´en´eral la r´eunion
N[
F =F ∪...∪Fi 1 N
i=1
n’en est pas un (consid´erer par exemple deux droites concourantes dans un plan).
Soit E un K-espace vectoriel. On appelle famille (finie ou infinie) de vecteurs de E une
collection S = (s ) de vecteurs de E, non n´ecessairement distincts, num´erot´es par desi i∈I
indices i dans un certain ensemble I (lorsque la famille est finie de cardinal m, on choisit
en g´en´eral I ={1,2,...,m}). Une combinaison lin´eaire d’´el´ements de la familleS est un
vecteur de E de la forme X
λs,i i
i∈I
ou` (λ ) est une famille de scalaires n’ayant qu’un nombre fini de coefficients λ = 0 (dei i∈I i
sorte que la somme se r´eduit en fait a` une somme finie); on dit qu’une telle famille de
scalaires est presque nulle (noter que cette condition est toujours satisfaite si I est fini).
Lesous-espace vectoriel de E engendr´e parS est l’ensemble Vect(S) des combinaisons
lin´eaires d’´el´ements deS. Autrement dit,
n oX
Vect(S) = λs ; λ ∈K, λ = 0 en nombre fini .i i i i
i∈I
On dit qu’une familleS de vecteurs deE est g´en´eratrice (ou engendreE) si tout vecteur
v∈E est une combinaison lin´eaire d’´el´ements deS (autrement dit si E = Vect(S)).
Exemples 1.5.
3(1) Un plan deR est engendr´e par deux vecteurs non colin´eaires de ce plan.
n(2) Les n vecteurs (1,0,...,0), ... , (0,...,0,1) engendrentK .
n(3)K[X] est engendr´e par la famille infinie (X ) .n∈N
(4) Une famille quelconque S est toujours par d´efinition une famille g´en´eratrice de
Vect(S).
On dit qu’une familleS = (s ) de vecteurs deE estlibre si pour toute famille de scalairesi i∈I
(λ ) presque nulle on ai i∈I
X
λs = 0⇒λ = 0 pour tout i∈I.i i i
i∈I
Cela aussi revient a` dire qu’aucun ´el´ement deS n’est combinaison lin´eaires des autres.
Exemples 1.6.
(1) Une famille contenant 0 n’est jamais libre.
(2) Une famille contenant deux vecteurs identiques n’est jamais libre, puisqu’on peut
´ecrire 1·v+(−1)·v = 0.
(3) Si v ,v ∈E, une famille (v ,v ) est libre si et seulement si v et v sont non nuls et1 2 1 2 1 2
non colin´eaires.
(4) La famille de fonctions continues (f ,f ,f ) deR dansR telle que1 2 3
2f (x) = 1, f (x) = cos(2x), f (x) = cos (x)1 2 2
n’est pas libre (pourquoi?)
665
n(5) La famille (1,0,...,0), ... , (0,...,0,1) de vecteurs deK est libre.
(6) La famille (f,g) de fonctions f(x) = cos(x), g(x) = sin(x) surR est libre.
On dit qu’une famille de vecteurs B = (e ) est une base de E si elle est a` la fois libre eti i∈I
g´en´eratrice. Cela revient a` dire que tout vecteur x de E s’´ecrit de mani`ere unique commeP
combinaison lin´eairex = xe d’´el´ements deB (la somme n’ayant qu’un nombre fini dei ii∈I
termes x = 0).i
Exemples 1.7.
n(1) La famille de vecteurs (1,0,...,0), ... , (0,...,0,1) forme une base deK , appel´ee
base canonique.
n(2) La famille (1,X,...,X ) forme une base de l’espace vectoriel, not´eK[X] , des po-n
lynoˆmes a` coefficients dansK de degr´e au plus n. On a donc dim K[X] =n+1.K