Le taxi s’arrêta juste devant le bar des routiers. Il n’était que six heures, mais même dans cette aube blafarde, le troquet était plein d’hommes en tee-shirt ou en marcel, qui venaient là juste pour le petit noir avant de reprendre le cerceau… Linda régla sa course et descendit de la voiture. C’était une grande femme brune. Elle portait sûrement une perruque, car sa coiffure, tombant en cascade sur ses épaules lui mangeait le visage jusqu’aux yeux qu’elle cachait derrière des lunettes noires, très star. Elle était maquillée avec soin, yeux faits, et lèvres colorées d’un rouge pourpre presque noir, sans aucune agressivité. Elle était vêtue d’une sorte de combinaison de cuir d’agneau fin et couleur chocolat, rehaussée de piqures blanches, très moulante, d’une seule pièce, sans doute très chère mais qui faisait ressortir une poitrine généreuse, et surtout soulignait de longues jambes fines. Des bottines à talons, de la même couleur, mais bien trop hauts cambraient la cheville et rendaient sa démarche lente et comme altière. Elle n’hésita pas. Elle entra dans le troquet. Son arrivée stoppa presque immédiatement les conversations de voix fortes et viriles. C’était comme le reflux d’une marée sonore, jusqu’à ce que le silence s’installe momentanément. Linda se dirigea vers le bar, que le patron essuyait déjà énergiquement d’un coup de chiffon pas très net. Elle prit place sur un haut tabouret qui permit de mettre ses longues jambes fuselées en valeur.
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