Les débuts de la diversification des mammifères modernes restent mal connus à ce jour par manque de fossiles, particulièrement dans certains continents-clés de l'hémisphère Sud tels que l'Afrique. Emmanuel Gheerbrant, chargé de recherche au CNRS, a annoncé en juin dernier, dans le cadre d'une convention de collaboration franco-marocaine entre notamment le Muséum et l'Office Chérifien des Phosphates, la découverte d'un des plus anciens ongulés modernes dans des niveaux paléocènes du Maroc. Âgé d'environ 60 millions d'années, ce mammifère fossile appartient à une nouvelle espèce nommée Eritherium azzouzorum. Il provient du même bassin à phosphates des Ouled Abdoun (Maroc) que Phosphatherium escuilliei, découvert en 1996 par la même équipe, et qui était, jusqu'à la découverte d'Eritherium, le plus ancien représentant des éléphants (55 millions d'années), mais de couches sédimentaires plus basses. C'est donc le plus ancien représentant connu des ongulés africains, et en particulier de l'ordre des éléphants dont il conforte l'origine africaine ancienne. L'ordre des éléphants, ou Proboscidiens, n'est représenté aujourd'hui que par 3 espèces, mais il a une longueet très riche histoire évolutive passée illustrée par 180 espèces fossiles.
Eritherium azzouzorum est petit (4 à 5 kg) et extraordinairement primitif. Il témoigne de l'émergence d'un ordre d'ongulés modernes à un stade archaïque inédit, illustré par des réminiscences originales chez les Proboscidiens avec des groupes primitifs, par exemple parmi les condylarthres (des ongulés archaïques qui se sont développés à la fin du Crétacé et au début du Tertiaire et sont à l'origine des herbivores modernes). Son grade primitif indique d'une part une évolution rapide des Proboscidiens au passage Paléocène-Eocène (il y a environ 55 millions d'années) telle que l'augmentation de la taille, et d'autre part la diversification rapide des ongulés africains après la crise Crétacé-Tertiaire il y a 65 millions d'années.
Un géologue observe les figures sédimentaires dans un affleurement de sables jaunes d'âge miocène moyen (12 à 14 millions d'années), au bord de l'Amazone, près d'Iquitos (Pérou) où 25 fragments d'ambre ont été découverts. L'étude des sédiments d'âge miocène du bassin amazonien permet de déchiffrer son histoire et de mieux comprendre l'apparition et l'évolution de son exceptionnelle biodiversité.